Végéter, faire l’épave, s’échouer sur le divan, être rien de moins qu’un déchet! Ça nous arrive à tous pour le meilleur et pour le pire.
Pour bien mettre le tout en contexte, il s’agit de ses moments crasses où les fruits ou la moindre verdure sont bannis de l’environnement. Dans le salon règne des odeurs fortes et insistantes de friture, d’une pizza n’ayant rien de gastronomique, de crème glacée ou d’une de ses combinaisons fatales de sucre et de gras qui forment les meilleurs desserts. Sur la TV, l’heure n’est pas aux documentaires scientifiques ou historiques, ni non plus aux films de répertoire sibyllin. Non, c’est plutôt le film d’adolescent que tu écoutes encore avec un plaisir coupable, la série que tu ne finis plus de recommencer ou un feu d’artifice avec mitraillettes, explosions et poursuites automobiles. En gros, ça vole pas haut aujourd’hui! Drôle de sensation de plaisir et de culpabilité.
C’est sain et malsain à la fois. C’est une échappée, un temps mort dans la vie effrénée, un fuck off au monde entier, une chute libre moyennement calculée. Comment bien juger du phénomène?
D’une part, n’a-t-on pas besoin de vacances dans la vie, d’un certain équilibre, de nos moments purement égoïstes et irresponsables? La douce jouissance du sentiment de légèreté n’est certainement pas à dédaigner. En même temps, la vie n’offre qu’un seul billet de passage et la gaspiller dans la médiocrité ne peut mener que vers la désolation. Une question d’équilibre donc, ça va de soi! Kundera a écrit un magnifique roman sur le dilemme : L’Insoutenable légèreté de l’être.
Là où je veux en venir toutefois, c’est qu’il me semble que je me permets souvent trop fréquemment mes journées de dérive et que je ne suis certainement pas le seul. Après un peu de réflexion, le diagnostic, qui n’a rien de révolutionnaire, est tombé. Ma vie, la vie de nos jours, puisque le constat est à peu près généralisé, contient quelque chose de malsain. La course épuisante aux réalisations multiples (il faut voyager, avoir une famille, avoir des diplômes, un bon travail, s’impliquer partout) fait ses ravages. Ça pèse, c’est lourd, le goût de se soulager des fardeaux devient irrésistible. Et pourtant, merde, on ne va pas condamner toute ambition sous prétexte que c’est pas évident.
Je n’ai malheureusement pas de conclusion à offrir! Oui, regarder Le Seigneur des Anneaux 1, 2 et 3 d’un seul trait en avalant la moitié des réserves de chips du dépanneur chinois du coin a quelque chose d’attrayant! Le sentiment de l’enlisement l’est un peu moins. Au bout du compte, il est certainement vital que ce genre de journée demeure extraordinaire, une mesure exceptionnelle, une belle et rare dérape!
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