Les liens du sang ne garantissent en aucun cas une amitié éternelle. Entre l’amour et la haine, la complicité et la trahison, une relation fraternelle n’est jamais au beau fixe. C’est ce que nous avons constaté, mon frère et moi, dès notre entrée respective dans l’adolescence. Lui, tombeur de ces dames, populaire, avec des amis à perte de vue. Moi, timide et maladroite, sans une once de popularité, préférant la compagnie d’un ordinateur et d’un programme Word à celle d’un compagnon humain du même âge. On peut dire qu’un monde entier existait entre lui et moi.
J’ai fini par comprendre que le souci était que nos réalités divergeaient complètement. Les deux extrêmes, c’est ce que nous étions, mon frère et moi. J’étais l’eau, il était le feu. J’étais Pluton, il était Mercure. « Vous n’êtes que deux, alors endurez-vous! » fut l’une des phrases clés de notre mère durant notre adolescence. Nous avons donc suivi ses instructions; sans nous aimer, sans nous haïr, nous nous sommes endurés.
Le plus grand problème était l’ignorance que nous avions développée à l’égard de la réalité et du quotidien de l’autre. Il ne me comprenait pas, je ne le comprenais pas. Il ne s’intéressait pas à mon quotidien, je ne m’intéressais pas au sien. Peut-être que tout aurait été différent si je m’étais intéressée aux activités qui lui plaisaient tant à l’époque et s’il s’était intéressé aux histoires qui composaient la raison de vivre de mes blogs, qui étaient autrefois sur la plateforme Skyblog (ce qui ne nous rajeunit tous d’aucune façon).
Cher humain vivant des difficultés quotidiennement, que ce soit avec des enfants qui ne sont pas en mesure de s’endurer ou avec un frère ou une sœur qui te donne envie de faire la crise du bacon, je t’informe avec enthousiasme que tout finit par s’arranger grâce à un passage obligé pour tous : le déménagement.
À la suite du départ de mon frère et de sa douce moitié, plus rien ne fut pareil. L’incompréhension qui causait tant de chamboulements dans notre relation fit place à un bonheur tout simple que ressentent un frère et une sœur qui s’aiment. Les conversations entre nous s’animent, les rires jaillissent, et tout ça parce qu’on a fini par apprendre à faire plus que de s’endurer.
Aujourd’hui, nos deux réalités sont relativement toujours exactes, mais il n’y a plus l’ignorance d’autrefois. On peut dire que le monde entre lui et moi s’abaisse toujours plus de jour en jour, pour ne devenir qu’un vague souvenir.
Patrick, mon frère, je t’aime. ♥
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