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rémunération

Ça fait un mois que je procrastine à envoyer mon texte parce que je ne trouve pas les bons euphémismes pour mon sujet. Parce que, malheureusement, je fais partie de cette portion maladroite de la population qui a de la difficulté à parler d’argent. C’est comme un sujet sensible qui me rend mal à l’aise. Et pourtant, c’est ce qui « paie le loyer ». Donc parlons-en pour de bon : les métiers artistiques freelance (indépendants, pigistes) et la rémunération.

Aujourd’hui, je vous parle de mes deux métiers freelance : artiste capillaire et maquilleuse.

J’ai d’abord fait mon cours il y a 10 ans en coiffure. J’ai travaillé en salon un certain temps et je suivais des formations en dehors de mes heures de travail, que j’ai payées de mes poches, pour me tenir à jour dans les tendances. J’ai ensuite fait un cours en maquillage et j’ai aussi suivi des formations complémentaires pour me perfectionner. Puis, j’ai dirigé mes études vers autre chose, tout en gardant le domaine de la beauté comme un à-côté parce que c’est une forme artistique qui me fascine et qui est tellement valorisante lorsqu’on peut aider autrui simplement en ajoutant un petit complément à sa personne.

Depuis 10 ans, j’exerce la coiffure sur une base régulière avec une petite clientèle tissée serrée. Il y a ces personnes que j’adore, et il y a celles qui me contactent par recommandations et qui s’essaient à obtenir mes services sans payer. Combien de fois je me suis fait demander « une coupe de cheveux en échange d’une bouteille de vin » (je ne bois pratiquement pas d’alcool)? Combien de fois je me suis fait offrir des contrats pour maquiller 6-7 personnes « en échange de visibilité »? Et j’en passe.

Juste en matériel, pour couper des cheveux, un coiffeur ou une coiffeuse doit débourser notamment pour l’aiguisage de ses ciseaux, pour ses pinces et pour sa cape de coupe. Pour maquiller, un maquilleur ou une maquilleuse doit débourser notamment pour ses produits de maquillage, ses pinceaux et les produits pour nettoyer ses pinceaux (sans compter le temps qu’il ou elle prend par la suite pour les nettoyer).

Pendant longtemps, je me sentais mal et j’acceptais souvent les contrats « cheaps » pour être smatt, et aussi un peu par pitié. Mais avec du recul, j’ai réalisé que ça dégradais mon expertise. Et pas seulement la mienne, mais celle de l’industrie. Quelqu’un de professionnel qui veut continuer d’exercer son métier avec passion doit être capable d’imposer ses limites. C’est correct de vouloir faire plaisir et de faire des contrats « gratuits » à l’occasion, lorsque c’est une cause qui correspond vraiment à nos valeurs. Mais c’est correct aussi de dire non.

Aujourd’hui, je parlais pour moi, mais ça s’applique généralement aussi pour le pigiste, le mécanicien, le cuisinier, le prof de ballet ou encore toute autre forme de métier exploité. Parce qu’une bouteille de vin et de la visibilité, ça ne paye pas le loyer.

Source photo de couverture

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