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Star Wars a atteint son apogée il y a dix ans.
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Commençons par peindre un portrait général de cette série culte : entre 1977 et 1983 sortent respectivement les trois premiers films de la saga, plus tard rebaptisés Un nouvel espoir (IV), L’Empire contre-attaque (V) et Le Retour du Jedi (VI). Ces trois films réalisés par George Lucas, un visionnaire de l’époque, deviendront aujourd’hui ce qu’on appelle la Trilogie originale. On y découvre un vaste univers, surpassant tout ce qu’on avait imaginé en termes de technologie et de créatures, mélangeant science-fiction et fantastique pour exposer aux yeux du public l’héroïque récit de Luke Skywalker, l’homme qui s’est insurgé contre les griffes d’un empire tyrannique qui régnait sur toute la galaxie. Il est fascinant de voir qu’après tout, la narrative principale de la Trilogie originale constitue à son état le plus simple une lutte entre le bien et le mal, opposant la Rébellion à l’Empire, le côté lumineux au côté obscur de la force, les Jedi aux Sith… enfin, vous comprenez l’idée. Une autre particularité de cette trilogie originale est l’accent particulier mis sur les personnages, et non sur la trame narrative. C’est notamment pour cette raison que le fameux trio composé de Luke, Leia et Han a su charmer des millions de spectateurs qui sont devenus aujourd’hui des défenseurs de cette trilogie, et par conséquent, des adeptes des nouveaux épisodes confectionnés par la main de Disney. Appelons ces films à venir la Nouvelle trilogie.
Cependant, cette concentration sur les personnages, probablement en raison des limites budgétaires et technologiques de l’époque, a aussi résulté en une limitation des aspects plus généraux concernant la trame narrative. À quoi ressemble la vie usuelle d’un citoyen habitant sur une planète sous le règne de l’Empire, si celui-ci n’a pas la chance de devenir un héros comme Luke? Qu’en est-il des mondes qui ne sont pas occupés par l’Empire ou qui n’hébergent pas de rebelles? Quel est le contexte politique? Comment l’Empire fait-il pour assurer son bon fonctionnement? La Trilogie originale ne fournit pas de réponses à ces questions, et franchement, je ne pense pas qu’elle a besoin d’y répondre. Il s’agit après tout d’une histoire de héros qui triomphent contre les méchants, et le reste ne sert (principalement) que de décor pour permettre aux actions des personnages d’avoir lieu. Tout détail mentionné précédemment ne serait donc que superflu. N’empêche, cela n’enlève en rien à la valeur de ces trois premiers films : une aventure qui fait rêver enfants et adultes de tout âge impliquant des combats spatiaux à couper le souffle, inspirés des escarmouches aériennes de la Seconde Guerre mondiale, un champ d’énergie mythique nommé la Force, des engins volants et des armes à énergie qui remplissent l’écran d’effets spectaculaires qui ont su prendre une longueur d’avance considérable sur les standards des effets spéciaux de l’époque.
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S’ensuit plus d’une quinzaine d’années de silence radio. Cette période d’absence, durant laquelle Lucas prendra le temps de développer de nouvelles idées, sera dure pour les fans, mais cruciale pour l’avenir de la saga. Au tournant du XXIe siècle, les trois films qu’on qualifiera par la suite de Prélogie sont diffusés respectivement en 1999, 2002 et 2005 : La Menace fantôme (I), L’Attaque des Clones (II) et La Revanche des Sith (III). La réception est critique : on blâme notamment la surutilisation des effets numériques plutôt que les effets pratiques, contrairement à la Trilogie originale, ainsi qu’un mauvais jeu d’acteur lié aux nouveaux personnages. Pour ma part, en tant que partisan de la Prélogie, je dois admettre que certaines de ces accusations sont fondées, mais elles ne font pas pour autant de ces films de mauvaises œuvres cinématographiques. Au contraire, la seconde trilogie des films Star Wars parvient à innover de nouveau dans presque tous les champs, que cela soit au niveau visuel, sonore, ou encore narratif. L’histoire raconte un récit à l’échelle intergalactique, impliquant des enjeux politiques dignes d’intérêt, d’innombrables nouveaux mondes exotiques qui séduisent par leur beauté, des batailles vraiment épiques, et ce qu’on nous avait promis depuis trente ans lors de la sortie du premier film : le duel final entre Obi-Wan Kenobi, Maître Jedi, et son ancien apprenti : Anakin Skywalker, le père de Luke Skywalker, l’élu qui était supposé apporter l’équilibre à la force… Et les films respectent toutes ces promesses, sous la forme d’une tragédie shakespearienne accompagnée par une trame sonore au son moderne, mais déchirant, pleurant la chute d’un héros dont le destin était de sauver l’univers.
Star Wars est en définitive l’histoire d’Anakin Skywalker, de sa genèse, de sa chute, de sa rédemption. Alors que la Prélogie nous expose un homme ambitieux et puissant, amoureux et fidèle à ses amis, cet homme, rongé par son arrogance, deviendra par la suite le principal antagoniste de la Trilogie originale : Darth Vader. À la fin du sixième film, Le Retour du Jedi, l’histoire d’Anakin s’achève par sa rédemption : ramené à la raison par son fils Luke, Darth Vader se sacrifie en emportant le dernier des Sith avec lui. Ainsi, la prophétie est réalisée : les Jedi et les Sith ne sont plus, ce qui apporte un équilibre à la force et met un terme à la lutte qui fait rage depuis des millénaires entre le bien et le mal.
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Voilà donc la première raison pour laquelle je m’oppose à la réalisation de nouveaux films, comme la Nouvelle trilogie et Dieu sait ce qui suivra. Star Wars n’est pas l’histoire de la lignée des Skywalkers, comme le prétendent certains, mais bien l’histoire d’Anakin Skywalker. Et son récit s’est achevé avec le dernier film de la saga (le sixième). La légende d’Anakin est terminée, et dans cette optique, l’ajout de nouveaux films à cette saga devient alors tout à fait superflu. Cela ne veut pas dire pour autant que les nouveaux protagonistes du Réveil de la Force ne sont pas intéressants. Au contraire, Finn, Rey et Poe sont d’excellentes figures qui apportent une bouffée d’air frais à la saga et qui possèdent beaucoup de charme, mais d’un autre côté, j’ai l’impression qu’on tente de les imbriquer dans quelque chose qui est déjà achevé. Star Wars n’est pas Star Trek, voilà !
Maintenant, d’un point de vue scénaristique, Le Réveil de la Force possède beaucoup trop de similarités avec le premier Star Wars de Lucas, Un nouvel espoir. Un groupe portant le nom de Premier Ordre est né des vestiges de l’Empire établi par Palpatine et règne maintenant sur la galaxie. La Résistance, un groupe de rebelles, tente de lutter désespérément contre ce nouveau régime despotique qui, grâce à la base « Starkiller » (vraisemblablement une troisième étoile noire), a anéanti les planètes hébergeant les forces de la République. Le Premier Ordre braque maintenant son canon en direction de la Résistance : celle-ci, dans un dernier élan, envoie toute sa flotte dans la tentative de détruire la Starkiller. La Résistance triomphe. La base du Premier Ordre explose. Luke Skywalker est en vie. Générique de fin. Cette forte ressemblance constitue la plus grosse faiblesse de ce film selon moi. Le Réveil de la Force est plus imitatif qu’innovateur, et cela pose un problème. Alors que chaque précédent Star Wars avait apporté son lot de fraîcheur et d’originalité, ce nouvel épisode de la saga a choisi de prendre une route sûre afin de plaire aux fans de longue date, en leur apportant essentiellement le même plat qu’on leur a servi il y a trente ans, remis au goût du jour.
Voilà donc pourquoi donc Le Réveil de la Force m’a laissé avec un arrière-goût plutôt amer.
La suite la semaine prochaine : La tragédie d’Anakin Skywalker
Par Foan Song