Ces journées-là, ces maudites journées-là où on voudrait fondre dans notre lit, ne faire qu’un avec lui, sacrer au bord du chemin nos responsabilités pis nos angoisses, disparaître entre le drap contour et la douillette.
J’ai une amie qui aime raconter que ce serait donc l’fun de pouvoir sacrer notre camp de nos journées quand ça va pas, de disparaître dans un ailleurs un peu flou, de prendre une pause de notre vie.
Des fois, j’ai de la misère à m’imaginer que cette amie que j’admire puisse vouloir être ailleurs que dans sa vie que je trouve awesome et admirable. J’ai de la misère à m’imaginer qu’à elle aussi ça lui arrive de manquer de motivation, d’avoir la tête en orage, d’en avoir sa claque.
Mais en même temps, ça me rassure de savoir que je suis pas toute seule dans cet arche de Noé de tristesse sans nom, ça me rassure qu’on soit ensemble dans ce bateau-là, ça me fait moins peur qu’on finisse en naufrage parce que je sais qu’ensemble on sera toujours plus fort que tout seul (pis qu’au pire on jouera du violon ensemble en se souriant avec les yeux, même si on sait pas en jouer, jusqu’à ce que le bateau soit entièrement submergé, comme ces violonistes à la fin du Titanic).
Quand t’as l’impression de vivre dans le ralenti du film de ta vie qui va trop vite pour toi, quand tu voudrais faire pause, pis mute, pis toute le kit au complet, habille-toi donc de ton kit le plus confortable, et sors donc respirer l’air.
C’est pas obligé d’être pour longtemps, ça peut même être juste pour aller à l’épicerie t’acheter du pop corn, de la crème glacée, du kombucha, ça peut être juste sortir sur ton balcon pendant deux minutes pour t’aérer les esprits, te changer l’air de celui de ta chambre.
Va te réchauffer avec un café (le plus près de chez toi bien sûr). Moi, c’est les london fog qui m’apaisent le plus (un thé earl grey latté avec de la liqueur de vanille dedans, allô miam), pis on dirait qu’il y a quelque chose dans le nom qui me réconforte encore plus et qui me donne comme le droit de « feeler » brumeuse et décalée du reste du monde.
Donne-toi des petits objectifs réalisables que tu vas être fière d’avoir accomplis après. Fais une brassée, écris une page de journal, achète-toi un livre à colorier nono sur Amazon (moi j’en ai trois, très nono, quand je colore, ça me fait rire et pendant ce temps-là je pense à rien, je suis pas sur mon cell, sur les réseaux, à me sentir pas assez, je suis juste moi, presque sur pause).
Ce que je veux dire c’est, t’as le droit mon amie, de pas être au top, de pas péter le feu, de pas être celle qui est sur mille projets à la fois, de pas être celle toujours ailleurs dans ses stories.
T’as le droit d’être dans la vraie vie, de brailler une shot sans savoir pourquoi pis d’écouter un film triste après pour pleurer encore un peu plus.
T’as le droit d’être triste tout court.
T’as pas de compte à rendre à personne et c’est correct de pas être productive comme une machine, et c’est correct d’avoir des émotions et que ce soit pas nécessairement parce qu’on est en syndrome prémenstruel.
En ce moment, je suis dans un café et je bois un london fog, et il pleut dehors, et ça fait du bien. La personne derrière moi vient de dire à son ami « j’ai encore quatre heures pour penser à quel point la vie c’est de la marde et après je vais travailler ». Ça me fait sourire, cette idée d’être triste, d’en profiter à fond, et de se dire qu’après 4h c’est fini. De faire des compromis, des deals avec soi-même. Je pense que c’est là toute la nature de la solution.
Vaut mieux « dealer » avec mes petites peines, les gérer avec de petits objectifs, de petites récompenses, que de plus savoir comment retrouver la surface après avoir accumulé trop de petites peines.
Je te tchine-tchine ma tasse, les yeux brouillés, pis je te dis que c’est ok. Prends soin de toi ma belle amie.
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