Oh YES !
Deux mots.
Ces deux mots-là sont sûrement les premiers du genre que t’as entendus.
Oh YES ! T’as appris très vite à les dire.
En jouant au ballon chasseur avec tes Stan Smith verts et blancs.
Quand le ballon tapait dans la face de Steve ou bumpait les jambes poquées de Mélanie.
Oh YES !
Oh Yes ! La puck est entrée dans l’net.
Tu me prêtes ton bigweel ? Oh Yes !
Oh Yes ! Ils ont de la slush mauve.
Oh Yes Back to the future III est sorti!
Des mots rassemblés qui sonnent drôles pour désigner le film avec Marty Mcfly.
Oh YES ! Les cités d’or commencent !
Oh YES une joke de Bazooka Joe que je comprends pis que j’ai jamais lue.
Pis peu à peu, il y eut d’autres mots comme ça : toaster, truck, break, cool…
Des mots que tu ‘’catchais’’ parce qu’ils voulaient tout dire.
Fuck ! Pickel ! No ! Gun !
Jusqu’au jour où, Yvette, ta prof de deuxième a dit : aujourd’hui on va apprendre l’anglais les zamis!
Hein ? Wo minute, une nouvelle langue pour jaser-là ?
Pour tous les mots ?!
Même pas une langue inventée comme quand tu joues aux indiens?
Quoi ? Les sons de ‘’tounes’’ que tu imites sur tes cassettes de musique ça veut dire quelque chose?
Quand le teacher a commencé à dire mother pis father, il y a quelque chose en toi qui te disait mother fucker, pis que tu te faisais avoir pour l’éternité.
Quoi ? Tu les aimes toi les films doublés.
Rien de mieux qu’un bon Slap Shot pour se le remémorer.
Pourquoi Yvette a pas bu un cinquième café pis grillé une smoke ben relaxe au lieu de commencer le nouveau programme à grand coup de « Head and shoulders, knees and toes’’
How are you-fine-thank you-and you…cossé ça ?
Pourquoi faut-il apprendre tout ça ?
Non plutôt, pourquoi dans ta boîte à poux il y a juste une langue, la tienne, qui veut vraiment coller ?
Pourquoi le français est-il si en amour avec ta bouche et tes oreilles, qu’il veut les frencher sans concession ?
Pourquoi le temps des verbes décide aléatoirement lui-même à la sortie de ta pulpeuse?
Pourquoi tu traduis du français à l’anglais dans ta tête pas carrée ?
Pourquoi tu fais l’amour en français, tu cuisines en français, tu fais le party en français, pis que tu tonds ton gazon en tabarnak ?
Mais le plus surprenant, c’est qu’avec le temps, cette langue ‘’maudite’’ qui n’est pas de Molière devient très insidieuse.
Elle s’incruste sans régner et c’est cela qui te hante.
Elle est là, latente à toujours te menacer de te prendre.
Alors tu l’absorbes à grandes lampées des: dropper, checker, downloader, email, parking, fun, delivery, stock up, et encore…and again…
Tu ne peux prétendre que tu parles cette langue du box-office, mais tu en es inondée.
La Noyée de Gainsbourg.
Tu ne fais pas que l’utiliser non, tu SCRAPES ta propre langue par l’envahissement de l’autre.
Il n’y a pas un parasite qui fait du si bon travail.
Pas une flamme qui ne brûle mieux.
Pas un macchabée qui ne soit si regretté.
Tu optes pour le short cut.
Belle optique qui me tique.
La moitié de tes phrases est en deux langues sans pouvoir te déclarer bilingue.
Il y a même des mots que tu ne sais pas dans ta langue et que tu t’acharnes à dire dans l’autre.
Tu es fucké!
Tu malmènes tes ancêtres, tu défèques sur le passé. Tu es colonisé.
C’est comme ça, retour en arrière impossible.
Acceptation.
La langue franc-glaise.
C’est aussi ce que t’es.
C’est unique.
Pourtant, quand je t’entends, c’est quand même funkyment joli.
À condition de te souvenir. Souvenir de Ta langue.
Tant que tu l’utiliseras avec toutes les autres du monde dentier.
N’y a-t-il pas de nouveaux spécimens hybrides qui naissent dans la nature sous nos yeux éblouis ?
Vocabulons libres. Au-dessus des guerres, de mots et d’autres.
Sinon achète-toi une Delorean, pis scram en 1759.
marie
Crédit photo: lechatorange.com