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Mon bébé,
C’est bientôt le temps de prendre ta place. Ta place à huit dollars, cette denrée rare, celle que plusieurs nouveaux parents rêvent d’avoir et que moi je peux t’offrir parce que j’exerce le bon métier. Au-delà de ce privilège, il y a ton cœur et le mien, qui battent l’un pour l’autre depuis maintenant dix-neuf mois. Tu as peut-être passé neuf d’entre eux dans mon ventre, mais, déjà, je t’aimais inconditionnellement.
Mon bébé,
Les jours passent et je réalise à quel point je suis privilégiée d’avoir pu rester à la maison avec toi aussi longtemps. Du haut de tes dix mois, tu t’apprêtes à vivre un grand changement. Je t’en parle, parfois, et je t’explique qu’à cet endroit tu seras bien. Tu t’y amuseras, avec tes nouveaux copains. D’autres adultes prendront soin de toi, et maman reviendra. Puis ce matin viendra où tu pleureras mon départ en ayant peur de ne plus jamais me revoir. Le cœur gros, je te rassurerai en te promettant de revenir te chercher et, les yeux remplis d’eau, je ferai demi-tour pour aller travailler.
Mon bébé,
Je voudrais que le temps s’arrête même si certains jours, sur mon dos, la routine pèse lourd. Je souhaiterais continuer de veiller sur toi toutes les heures du jour. J’aimerais pouvoir t’offrir encore longtemps la stabilité affective que tu connais et qui te rassure. Je veux que cette fusion, entre nous, perdure.
Mon bébé,
C’est avec un brin de culpabilité et la nostalgie du temps passé que je vais accepter cette nouvelle réalité. Je vais préparer ton petit sac à dos et laisser couler, sur mes joues, quelques larmes d’insécurité. Je vais mettre en place, dans ma tête, le déroulement de nos prochains matins pressés. Fidèle à ce que je suis, je vais m’assurer que tout est en place pour rendre ce moment doux et rassurant. Je vais croire en nous.
Mon bébé,
Malgré ces sentiments qui bouillent en moi un peu plus à chaque instant, je veux rationaliser le défi qui nous attend. Après tout, c’est une grande chance que nous aurons de pouvoir partager le même environnement. Sans que tu sois à la maison, je te saurai près de moi et je pourrai même, parfois, consoler tes chagrins et te faire un câlin.
Au fond de moi, mon bébé, je suis convaincue que tu t’adapteras et que c’est mon cœur mou de maman qui devra accepter de te voir partir, chaque matin, pour faire ton petit bout de chemin.
Par Sabrina Lachance