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Mon chum me frappait

On s’est connu dans un bar grâce à des amis communs, en octobre 2012. Il était drôle, cute et vraiment intelligent; tous les critères que je recherchais, dans le fond. On a commencé à être un couple à l’automne 2013. À cause de la distance, on ne se voyait pas souvent, mais on se parlait chaque jour sur Facebook ou sur Skype.

Après 6 mois, on se chicanait souvent. Il me reprochait plein de choses sans importance (genre que je trippais sur tel band ou telle série). Il devenait de plus en plus méprisant. Je voulais vraiment qu’il m’aime parce que, dans ma tête, on était faits l’un pour l’autre pis c’était pas si grave si j’arrêtais d’écouter mon band pref’ si ça faisait qu’il m’aimait.

Nos appels Skype sont devenus quotidiens, et chaque fois, ça finissait en pleurs. Il faisait des grosses crises. Il criait hurlait de toutes ses forces. Il lançait des objets sur les murs. Il me disait qu’il allait se suicider à cause de moi, et ensuite, il raccrochait et ne me répondait plus. J’essayais de l’aider du mieux que je pouvais. J’ai fini par découvrir qu’il avait des problèmes de consommation d’alcool. Quand on se voyait en vrai, il était plus en état de se contrôler parce qu’il ne buvait pas quand j’étais là.

J’ai fini par déménager dans la même ville que lui. On avait signé un bail pour juillet, donc j’étais dans un autre appartement en attendant. Je me suis dit que si j’étais toujours là, il allait finir par aller mieux. J’allais prendre soin de lui en étant présente, en l’aidant pour la cuisine, le ménage, l’université. J’avais vraiment hâte qu’on emménage ensemble. Notre petit cocon d’amour…

J’ai reçu un message de l’ancienne locataire me disant qu’on pourrait avoir l’appart’ un mois plus tôt si on payait pour le mois de juin le lendemain. J’étais tellement contente que j’ai pris ma voiture en direction de chez lui, pour qu’on aille ensemble à la banque sortir l’argent dont on avait besoin pour payer. Quand je suis arrivée, je l’ai attendu dehors. Il a fini par venir répondre 30 minutes plus tard. Il était saoul et très fâché que je sois là. On est quand même allés à la banque.

J’étais en train de conduire lorsqu’il s’est mis à me frapper le bras droit et les côtes. C’était la première fois qu’il était violent physiquement. À la banque, il m’a accotée contre le mur et il a mis sa main autour de mon cou en forçant pour que je ne touche plus le sol. C’était le soir, il n’y avait personne sauf une agente de sécurité qui s’est pointé le bout du nez pour voir pourquoi une fille criait aussi fort à côté du guichet. Quand il l’a vu, il a arrêté et elle n’a rien fait. Je me suis dit que c’était une exception et que ça n’allait plus jamais arriver.

Lorsqu’on a déménagé une semaine plus tard, j’ai gardé un chandail à manches longues presque toute la journée. Il faisait super chaud et j’ai fini par oublié que j’avais des bleus sur les bras, alors je l’ai enlevé. Presque instantanément, ma cousine et ma mère m’ont demandé ce que j’avais eu sur le bras. J’ai inventé que je m’étais cognée sur un meuble à mon travail. Je me suis sentie humiliée et faible. Ce ne fut évidemment pas le dernier de mes mensonges.

Il y a bien sûr eu d’autres épisodes de violence. La plupart du temps, je commençais à pleurer au premier coup qu’il me donnait, et pour le reste, je me positionnais en boule sur moi-même. Je fermais la switch de mes émotions et j’attendais que ça passe. Les policiers sont venus chez moi 7 fois entre novembre 2015 et avril 2016 parce que les voisins les appelaient. Je devais toujours être alerte à la possibilité de recevoir un coup, même quand je dormais. Il y a des fois où je m’enfermais dans la salle de bain avec un couteau parce que j’avais trop peur qu’il me tue.

Je me suis de plus en plus éloignée de mes amis. Je me suis isolée. Je restais le moins longtemps possible avec les gens avec qui j’étais obligée de parler. Je ne dormais presque plus. J’étais stressée chaque fois que je recevais une notification sur mon cellulaire.

J’ai menti à ma famille, à mes amis, à mon médecin, aux policiers, à moi-même. Je devais à tout prix me protéger de cette honte. Parce qu’il m’avait convaincu que tout ce qui m’arrivait était de ma faute.

J’ai fini par le laisser en revenant d’un party complètement saoule, un soir de décembre 2016.

Pendant toute cette relation, je n’ai jamais partagé ce qui se passait chez moi à ma famille ou à mes amis. Je savais que je devais me sortir de là, mais je savais ce qu’ils allaient me dire : « Pourquoi es-tu restée aussi longtemps? », « Pourquoi tu ne m’as rien dit? », « Pourquoi tu n’as pas appelé la police? », « Pourquoi tu ne portes pas plainte? » Ce qu’il faut comprendre, c’est que la violence conjugale nous plonge dans un cercle vicieux dont il est extrêmement difficile de se défaire. Même lorsque qu’on nous propose de l’aide, on agit comme si de rien n’était, comme s’il n’y avait pas de violence et que c’est la personne qui veut nous aider qui imagine tout ça. On pense qu’on est complètement seul, mais c’est faux.

Chaque année, la période du 25 novembre au 10 décembre permet de sensibiliser à la violence faite aux femmes. Si vous savez ou si vous croyez qu’un de vos proches est victime de violence conjugale, il y a plusieurs ressources qui sont à votre disposition. Apprenez à reconnaître les signes et n’hésitez pas à en parler avec un professionnel. Ça pourrait sauver une vie.

J’ai décidé de garder ce texte anonyme, pas pour protéger son identité, mais pour protéger ma famille et la sienne.

Anonyme

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