J’ai longtemps cherché quelqu’un qui allait m’aimer pour ce que je suis et non pour ce dont j’ai l’air, pour mes préférences au lit ou le solde de mon compte bancaire. J’ai donné mon cœur trop facilement à des gars infidèles, dans la garde-robe ou sur le rebound. On m’a aimé par égoïsme, pour expérimenter ou passer le temps. J’ai, depuis, trouvé la bonne personne. Au moment de la rencontrer, j’étais gravement sceptique, réservé et sur mes gardes. Je n’ai jamais cherché quelqu’un de parfait, mais il semblait parfait pour moi. J’ai attendu le défaut de fabrication, les vices cachés, le deal breaker qui allait me retourner sur le marché du célibat encore plus amer qu’avant. Les semaines ont passé, puis les mois; il était le même et toujours là. Avais-je dans ma vie celui que j’avais toujours attendu? J’ai alors décidé de tester cette théorie, inconsciemment, en additionnant les kilos…
Il faut dire que ses parents épicuriens m’ont grandement facilité la tâche : on mange divinement bien, chez la belle-famille! Certes, j’aurais pu dû refuser une troisième part de gâteau, mais c’était si bon et j’étais en mission. Ma petite voix intérieure le défiait : « Allez, montre-moi à quel point tu tiens à moi… ». 365 jours et 30 livres plus tard, il m’aimait encore et beaucoup plus que je ne m’aimais moi-même. Je venais de me faire prendre à mon propre jeu. J’ai eu beau prêter l’oreille au moindre commentaire désobligeant sur ma silhouette, une simple remarque inoffensive, une petite pointe à peine audible, rien. J’avais peut-être rencontré l’homme de ma vie, mais je détestais maintenant l’image que me renvoyait le miroir. Avec une estime de moi au plus bas et une libido en chute libre, je devais me reprendre en main. C’est en zappant un samedi après-midi que je suis tombé sur ce qui allait devenir mon plaisir coupable télévisuel.
La vie à 600 livres est une série documentaire qui s’échelonne sur une année dans la vie d’hommes et de femmes tentant de reprendre le contrôle de leur existence. Tous atteints d’obésité morbide en lien avec une dépendance à la nourriture, on y expose les conséquences désastreuses d’un laisser-aller alimentaire qui s’apparente davantage à une mort à petit feu qu’à un simple surplus de poids. Avec un pronostic sombre et inévitablement fatal, ils seront pris en charge par Younan Nowzaradan, un chirurgien bariatrique, qui sera d’une aide précieuse afin de les voir atteindre leur objectif primaire, c’est-à-dire survivre. Cependant, on n’efface pas des années de mauvaises habitudes alimentaires en un simple claquement de doigts.
L’entourage, qui sert à la fois de soignant, devient aussi facilitateur aux mauvaises habitudes de vie. Les repas sont généralement préparés par autrui et de préférence cuits dans l’huile. Dr Nowzaradan devra faire comprendre aux familles le rôle crucial qu’elles auront à jouer si le proche en question a une chance de s’en sortir. Vous serez confrontés à des histoires choquantes, comme le conjoint d’une participante qui préfère les femmes rondes et qui s’entête à continuer de lui servir de la malbouffe avec la menace de la quitter si sa perte de poids devenait trop significative. À la sortie de l’hôpital, après plusieurs semaines de traitement, c’est directement au service à l’auto qu’un candidat se dirigera pour finalement régurgiter son menu sur le bord de la route. Certains repousseront le premier lever postopératoire jusqu’à ce que le médecin, exaspéré, les retourne à la maison vivre dans le déni.
Loin de moi l’idée de me comparer à ces gens qui doivent littéralement perdre les deux tiers de leur masse corporelle afin d’éviter une mort certaine, mais je dois admettre qu’en ce samedi après-midi, je me suis senti moins loser d’avoir trente livres à perdre et grandement inspiré par ces gens ordinaires qui livrent le combat d’une vie. Un alcoolique peut décider de poser la bouteille et de ne plus jamais boire une gorgée d’alcool, mais la nourriture fait partie de notre quotidien, qu’on le veuille ou non. Il existe mille différentes raisons de manger, mais la principale devrait toujours être pour rester en vie et non pour se donner la mort…
Vous pouvez regarder La vie à 600 livres sur la chaine Moi et cie, ainsi qu’en version originale sur la chaine TLC.