À chaque année, c’est pareil. Les mois de novembre et décembre nous amènent les premières bordées de neige, font pousser de nouveaux jardins de givre aux fenêtres, nous forcent à troquer notre coupe-vent automnal pour notre manteau d’hiver. Les fans de Lorelai Gilmore ont déjà eu le temps de s’émerveiller de la première neige, les skieurs s’impatientent, le petit marcheur solitaire que je suis se réjouit de voir la grisaille d’automne laisser place à la bancheur hivernale. Sauf qu’à chaque année, les mois de novembre et décembre amènent aussi leur légion d’insoutenables chialeurs et leurs gémissements pathétiques contre le froid. Entre eux et un -30 degré, je vous laisse deviner ce que je prendrais.
Mise en scène :
Un de mes oncles : Noël…la seule maudite bonne chose qu’il y a durant l’hiver. Pis encore, qu’est-ce que tu veux qu’on fasse de nos congés avec l’ost…de frette?
Moi : Ouais, c’est vrai que ça se refroidit.
Moi (silencieusement) : Bon… un autre ! Vas-y mon homme, ruine mon hiver, dis-moi à quel point c’est de la merde vivre au Québec.
Oncle : Sérieusement, de toutes les places au monde, il a fallu que ce soit là où on se gèle le cul.
Moi : Bah… On va finir par se réhabituer. Après tout, on survit à chaque année.
Moi (silencieusement) : Voyons tabarn…! Ça fait 50 ans que tu vis ici, et t’as pas trouver moyen d’en revenir du froid. T’as jamais joué dehors durant l’hiver quand t’étais ti-cul ? Le ski, le snow, la raquette, le hockey, le patin, non!? Ça te dit rien?
Oncle : L’autre jour, c’était tout gelé. Je t’ai pris une de ces débarques. T’sais, tu commences la journée en te pétant la gueule. Rien de mieux, non? Maudit pays de merde avec sa cri… de glace!
Moi (silencieusement) : Pfff! Je ne te dirai pas que moi j’aime ça la glace, que je m’amuse à la faire craquer en sautant dessus et à prendre des élans pour glisser le plus longtemps possible. Je ne te le dirai pas, tu vas me prendre pour un p’tit con immature qui comprend pas ce que c’est que la vie, la vraie, celle avec les responsabilités pis toute… C’est toi l’gros con!
Moi : Ouais, mais il y a aussi les bons côtés de l’hiver. Les sports que plein de gens dans le monde connaîtront jamais, les enfants qui font des tunnels, des châteaux, la guerre des tuques. T’sais, c’est pas comme si on était pas équipés pour faire face aux inconvénients.
Moi (silencieusement) : Pourquoi te battre? Résigne-toi mon vieux!
Oncle : Ah! Toi, ça paraît que t’as pas de char, que c’est pas toi qui déblaie ton entrée. Tu m’en reparleras quand ce sera le cas mon ti-gars!
Moi (silencieusement) : T’es-tu sérieux avec ton «ti-gars»? En quoi c’est mature et responsable de détester ce qui est inévitable, de se pourrir sa propre vie et celle des autres autour?
Moi : J’te gage qui va m’parler de son voyage dans l’sud!
Moi (silencieusement) : Fuck!
Oncle : Hen? Qu’est-ce que tu as dit?
Moi : J’ai dit : « tes bagages doivent être prêts pour le sud. »
Oncle : Mets-en! Le cul dans le sable, le gros soleil, la plage…la belle vie mon ti-gars!
Moi (silencieusement) : C’est ça! Reste là le plus longtemps possible. Cri…-nous la paix. Va te prélasser dans ton tout-inclus. Nous autres, on aura notre fun sans toi.
Oncle : J’tenverrai des photos.
Moi : Ok, cool!
Moi (silencieusement) : ARK! Non merci!
Oncle : Pendant que vous allez tous vous geler le cul…
Moi (silencieusement) : Je te déteste. J’en ai assez. Bye!
Par David Morissette Beaulieu
Marie-Ève Joseph
Source photo de couverture