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Lettre à l'enfant que je n'aurai pas

Source : Unsplash

J’ai longtemps été persuadée que je te rencontrerais. Comme la plupart des gens, je me voyais dans ce tableau parfait. Toi et moi, maman et enfant.

Je suis certaine que tu aurais été un enfant malin, beau, intelligent et curieux, que tu sois une fille ou un garçon. Tu aurais peut-être eu mes yeux verts. 

J’ai attendu longtemps, en cherchant au fond de moi, que l’envie de te mettre au monde vienne. L’envie de te créer, mon enfant parfait. J’avais le cliché du bonheur dans la tête, comme dans les films, comme dans les publicités. Mais dans mon cœur il n’y a toujours rien : toujours pas le désir de te trouver. 

Plus je te cherchais, et plus je me trouvais. Plus je me trouvais, et plus je m’éloignais de toi et de ton image idéale. Tes cheveux blonds bouclés devenaient flous et se sont finalement évaporés.

On m’a fait croire, depuis toujours, que c’est de toi dont j’avais besoin pour être heureuse, épanouie, complète, conforme. Or, plus le temps avançait et plus l’idée de t’avoir dans ma vie me déplaisait. Et dans mon cœur, toujours aucune envie.

Qui suis-je pour fabriquer un être humain sans son accord? Je ne peux m’empêcher de me dire que toi, tu ne voudrais peut-être pas vivre dans ce monde, travailler, souffrir, te questionner, rencontrer des difficultés. Je refuse de te créer pour combler mes propres manques, mes insécurités ou mes curiosités. Je refuse de te créer pour me sentir aimée.

Pour t’accueillir dans ma vie, il aurait fallu que j’aie la force et les moyens de tout t’offrir, de tout te donner, de te protéger pour que le monde ne te heurte jamais. J’en suis incapable et je refuse que tu existes sans avoir TOUT à ta portée.

Je sais que je te prive aussi des belles choses qu’offre l’existence. Un coucher de soleil, une bonne bouteille de vin, l’étreinte d’un amoureux.se. Mais j’ai choisi de profiter de tout le temps qu’il me reste pour le vivre incroyablement fort. Et tu n’aurais pas eu ta place dans ce grand projet.

J’ai envie de choisir les instants où je pourrai errer sans but, ne me soucier de rien. Je ne veux pas te céder ma tranquillité d’esprit et mes nuits.

Être ta mère serait accepter l’épuisement de mon temps et de mon espace, en n’en gardant pour moi-même que les miettes. J’ai tant besoin de ce temps, de cet espace et de ma solitude, que je sais que nous n’étions pas compatibles. 

Je ne voudrais pas te donner mon corps non plus. Mon corps que j’ai détesté si longtemps et que je refuse de traumatiser à nouveau.

Pour plein de mamans, t’avoir aurait été le plus grand bonheur, l’épanouissement. Pour moi, la maternité est un renoncement de trop de parties de soi. 

Je suis admirative des femmes qui ont dans leur ventre et dans leur cœur le désir de te connaître, de t’aider à grandir, de veiller sur toi. Je n’en fais pas partie.

Et c’est pour ces raisons que nos existences ne se croiseront pas.

Tu sais, c’est aussi ça être une bonne mère : accepter qu’on ne souhaite pas l’être.

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