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Le temps gris

crédits: Unsplash

Ce soir, je me sens comme la grisaille de l’automne, même si on frôle encore l’été. Je me sens comme un jour de pluie, en novembre, ou comme un froid lundi de janvier. J’imagine que tu comprends ce que je ressens, au sens figuré. J’ai juste l’impression que la vie me bombarde de péripéties, l’une après l’autre, mois après mois. J’ai, d’ailleurs, déjà lu une phrase qui dit que la vie donne ses plus durs combats à ses meilleurs soldats. Crois-moi, je dois être dans le top 3 des soldats du jour.

Règle générale, je ne suis pas de nature pessimiste. Au contraire, je vois plus souvent le bon côté des choses, je suis résiliente et remplie d’espoir. Ce soir, c’est trop, au point où mon quotidien me dérange, m’impatiente, me rend intolérante. En aussi peu que dix mois, j’ai passé au travers du décès soudain de mon père, de la perte de notre enfant en début de grossesse, de l’hospitalisation de ma mère qui jongle avec sa maladie pulmonaire et même de la mort accidentelle de notre chat. Quand on me demande comment je vais, je m’empresse de répondre que je vais bien, que je suis forte et que je gère haut la main. La dernière personne qui a abordé le sujet m’a vue verser une larme en lui racontant machinalement à quel point je suis en contrôle présentement… Difficile de me croire !

C’est à ce moment que je remets toute ma vie en question. Je partirais dans le Sud, aller-retour indéterminé, juste pour me retrouver seule un instant. Évidemment, je m’ennuierais beaucoup trop de mes enfants, alors je reviendrais le cœur rempli d’amour. Ce sont eux qui m’aident à voir la vie en rose, qui me donnent le goût de me lever, à chaque matin, pour leur faire à déjeuner, et qui me rappellent à quel point la vie peut être belle.

Ce qui me manque, en réalité, c’est l’honnêteté envers moi-même. C’est de laisser transparaître ma vulnérabilité plutôt que de sortir mon armure de guerre et de faire abstraction d’une gamme d’émotions. Je peux admettre avoir de la peine, sans craindre de me faire juger. Je peux aussi admettre être à bout de souffle et accepter le soutien des gens qui m’entourent pour me ressourcer. Je peux avoir peur, même à l’âge que j’ai. Je peux me donner du temps et prendre soin de moi.

Quand j’y pense, j’ai côtoyé, plus souvent qu’autrement, dans les derniers mois, le deuil et son lot d’épreuves. Aujourd’hui, je veux arrêter de craindre l’avenir. Je veux regarder vers l’avant et apprécier chaque instant, tout en acceptant ce temps gris qui passe, parfois, et qui me fait grandir à chaque fois.

Par Sabrina Lachance

Révisé par Gabrielle Gardner et Amélie Carrier

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