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Le positivisme toxique –

Source: Unsplash

Ça m’a pris du temps avant de comprendre la raison du malaise que je ressentais chaque fois que l’on me balançait, avec les meilleures intentions du monde, une solution ou une phrase encourageante toute faite pour m’aider avec une inquiétude ou une difficulté que je rencontrais. C’est frustrant parce que ça ne laisse aucune place à la validité des émotions que l’on ressent. Comme si tout ce que je vivais devait se transformer presque immédiatement en expérience positive qui me permettrait d’avancer. C’est vrai qu’éventuellement, je grandirai des embûches traversées. Mais en attendant, je peux-tu juste m’arrêter un instant et vivre mes émotions sans les juger ? Sans chercher à les changer ? C’est vrai, des fois, j’ai juste envie que l’on reconnaisse ce que je vis. Que l’on reconnaisse que c’est fondamentalement difficile et que c’est correct de trouver ça dur et d’avoir envie de pleurer.

Il y a une culture du positivisme, de nos jours. Ce n’est pas forcément une mauvaise chose, d’ailleurs. Il faut s’entourer de personnes positives pour nous pousser à nous dépasser et à devenir la meilleure version de nous-mêmes. Là où ça devient un problème, à mon avis, c’est quand on essaie de régler des problèmes complexes avec des phrases simples comme « quand on veut, on peut » ou même, plus récemment, « ça va bien aller », sans se donner le droit de ressentir de la colère, de la tristesse, de la déception ou de la peur. À trop vouloir penser positivement, on peut finir par nier les émotions négatives que l’on ressent et se sentir coupable de les vivre, ce qui, finalement, donne l’inverse de l’effet recherché.

C’est vrai aussi, par contre, qu’avec nos horaires chargés, on se donne rarement le temps de mal aller. La vie va tellement vite et notre emploi du temps est déjà tellement rempli, il nous faut ce petit quelque chose pour se remettre rapidement sur pied et poursuivre notre vie. Ça marche certainement pour un temps. Mais ensuite ? Je crois qu’il est essentiel d’être à l’écoute de son corps et de vivre pleinement ses émotions, sans quoi elles finissent toujours par nous rattraper au détour du chemin.

J’ai vu trop de gens s’étourdir pour ne rien ressentir. Et je ne parle pas nécessairement d’abuser de substances pour oublier. Je parle aussi de comportements qui semblent positifs à première vue, mais qui, avec excès, finissent par nous engourdir : s’entraîner à outrance, travailler sans compter les heures. Complètement s’oublier. T’sais, quand on dit qu’une personne est tellement performante que c’est une vraie machine ? C’est supposé être un compliment, mais au fond, qu’est-ce que ça dit vraiment ? Qu’elle travaille sans relâche. Comme si elle n’avait pas de besoins. Comme si elle ne vivait pas des hauts et des bas.

C’est normal que le ciel ne soit pas toujours bleu (pour certains, il est même parfois très noir). C’est normal aussi d’expérimenter toute une gamme d’émotions. Ce n’est pas être faible. Ce n’est pas se morfondre sur son sort. Au contraire, c’est prendre le temps de reconnaître ce que l’on vit avant de passer à la prochaine étape et de s’accepter. Inconditionnellement.

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