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Le jugement des autres m’en fous (ou en tout cas j’essaie)

J’étudie en théâtre, ou en tout cas « j’étudiais », parce que là je suis graduée (même si je travaille pas encore dans mon « domaine » (parce qu’avoir un premier rôle à la tivi ça se fait pas sans chance et timing et talent et chance et timing (j’ai tu déjà dit timing?). Alors c’est ça, j’ai étudié en théâtre, et un jour, pendant mes études (qui furent fabuleuses) (sans jokes), j’ai croisé un professeur qui a jugé sage de m’évaluer de la façon suivante:

« Toi Virginie, quand t’es sur scène, t’es beige. On n’a pas envie de te regarder. »

Bon. Super.

Super, super cool wow super contente de savoir que je fais le même effet que du gruau.

Pas besoin de vous raconter que pour la fille qui rêvait d’être comédienne depuis le temps où Télé-Québec c’était le poste d’émission jeunesse cool, se faire dire « t’es beige » c’était pas le plus beau compliment de la terre mettons.

Heille, « être beige ».

Du plus loin que je me souvienne, on m’avait jamais dit quelque chose d’aussi profondément blessant que ces deux phrases-là. Cette première fois a aussi permis ma toute première révolte aux insultes qu’on pouvait bien me lancer en pleine face. (Je dis « première » révolte aux insultes parce que c’était la première fois que je le faisais face à l’autorité (j’avais déjà répondu des « ah non t’as pas rapport sérieux » au cours de mon primaire et secondaire, inquiétez-vous pas pour moi, j’ai toujours su me défendre avec une rhétorique infaillible)).

J’ai répondu: « vous savez quoi monsieur, je ne suis pas beige. Beige c’est sans saveur, c’est comme tout le monde, c’est ce à quoi on est indifférent. Si vous vouliez m’insulter de la meilleure façon possible et bien c’est réussi parce qu’il y a rien de pire à dire à une jeune comédienne pour briser son estime d’elle-même ».

Bon. J’ai pas exactement dit ça, mais presque, j’vous jure, en tout cas ça voulait dire ça. Et j’ai quitté le local en claquant la porte comme quand j’étais petite et qu’on m’envoyait réfléchir dans ma chambre.

Et c’est ce que j’ai fait. Je suis partie réfléchir. Réfléchir à la facilité avec laquelle on se permet de commenter la vie des autres et la façon dont ils la vivent. Réfléchir à ce réflexe qu’on a trop souvent d’enseigner en critiquant négativement au lieu de positivement.

Je veux dire, ultimement, on s’en fout, c’est juste une opinion, l’opinion d’un prof poche à qui je me serais jamais permis de dire que ce qui était beige dans l’histoire c’était ses cours à lui. Juste une personne, juste une opinion.

Heureusement, j’ai continué, heureusement, j’ai continué d’avoir du plaisir à faire ces études-là et à pratiquer cet art-là qui me rend si heureuse.

Mais quand même, si y’avait fallu que je le crois, je me serais empêchée d’être heureuse pour rien.

Je pense qu’il faut jouer à contourner les insultes et les jugements dans la vie. Tu trouves que je suis beige, ok, c’est ton opinion mon chum, moi pendant ce temps-là que tu perds à me mettre dans une boîte plate, je vais aller en explorer mille autres, je vais aller peindre des couchers de soleil dans ton dos tourné, je vais aller colorier les fenêtres pour colorer la lumière qui y entre, je vais tout faire pour me rappeler qui je suis, ou plutôt qui je ne suis pas, pis je te tiendrai même pas au courant de ce que ça donne, mon chum, tu peux rester concentré sur tes cols roulés carottés pis tes casse-têtes d’épaulards.

S’il fallait qu’on se laisse définir par chaque personne qui a une opinion sur nous, on en finirait pu!

Faut contourner, bien s’entourer, finir par en rire, embrasser les petites victoires qui coûtent rien, se féliciter des défaites qui nous font avancer. Faut sauter plus haut, courir plus vite, aimer plus fort. Faut se dépasser, jamais rester en place, jamais se complaire.

En tout cas, c’est ce que ça m’a donné envie d’essayer. Même si y’a des jours où je bouge pas de mon lit, même si y’a des nuits où j’ai la peur de l’avenir en insomnie.

Faut tout faire pour ne pas être beiges.

(Tu peux porter des cols roulés pis faire des casse-têtes pis être la personne la moins beige du monde aussi, y’a pas de manuel d’instruction, juste une quête de simplicité, pis de bonheur, pis de simplicité dans le bonheur, pis de monde entier heureux, pis unis à faire d’immenses casse-têtes 3 dimensions du cerveau humain ensemble en étant simples et heureux.)

Source photo de couverture: Unsplash

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