Il fait froid à l’extérieur. Le givre s’est logé dans les fenêtres. Le monde s’est recouvert d’un blanc immaculé.
Tout semble figé.
C’est ce matin-là que j’ai senti que tu me quittais peu à peu.
Je m’en suis aperçu par la façon dont tu as laissé planer l’imminence de ton départ. Déposant ici et là des parcelles de doutes au sein de notre couple.
Ces petits instants de remise en question qui m’ont lentement fait réaliser que tu me glissais entre les mains.
J’ai beau essayer de te rattraper à la chute, cela m’est impossible.
Tu es devenu si volatile que tu te mélanges à l’air.
La brise prend lentement un goût de désespoir.
Un goût teinté de détresse et d’espérance.
Je peux apercevoir l’amour que tu as pour moi fuir ton corps et s’y échapper, nonchalamment.
Je le remarque par la façon dont tu te meus dans notre appartement, comme si tout y était répugnant.
Je me sens impuissante face à ce qui est entrain de se produire. Je suis spectatrice. Je voudrais tenter de te retenir, empêcher ton départ. Je sais cependant que cela ne ferait qu’accélérer ta disparition. J’attends donc, dans l’espoir naïf que ton amour retourne là où il doit être.
…
La neige s’est accumulée.
Elle est maintenant d’un blanc aveuglant.
Tu m’annonce que tu n’es plus heureux avec moi, que tu pars.
Tu en as rencontré une autre.
Mon cœur se serre, j’ai mal.
Tu t’excuses, prétextant avoir besoin de changement. Je t’écoute attentivement. Sans dire un mot. Non pas parce que je n’ai rien à dire, mais parce que parfois, lorsque je souffre, les mots restent pris dans ma gorge.
Ils s’y accrochent obstinément m’empêchant d’émettre le moindre son.
Tu as rempli ta voiture.
Je t’ai silencieusement regardé quitter les lieux.
J’aurais voulu te retenir, mais on ne peut pas forcer l’amour à exister.
Comme on ne peut pas forcer un cœur à aimer.
Je reste là, assise au sol le visage ruisselant de toute cette tristesse liquide, cette tristesse que j’ai retenue devant toi par peur d’inonder l’endroit.
J’ai mal à l’amour.
Ma gorge se serre tellement fort, je suis persuadée qu’elle cherche à empêcher l’air d’y pénétrer.
J’ai de la difficulté à respirer.
Je voudrais me fondre au mobilier. Pouvoir y déposer toute ma souffrance. Me noyer dans le mal être.
…
Le temps a passé.
J’ai réappris à respirer.
La neige a fondu et a su laisser place au printemps.
Les jours ont passé et peu à peu, au rythme du vent, j’ai réappris le goût du bonheur.
J’ai su m’en remettre.
Même s’il m’arrive encore, parfois, de penser à toi.
Je me suis rendue compte qu’une peine d’amour ne tue pas, aussi douloureuse soit-elle, et qu’il faut seulement une bonne dose de temps pour colmater un cœur brisé.
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Par Emilie Helik Deschênes
Marie-Ève Joseph
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