« Prenez votre temps. »
« Prends ton temps. »
C’est le conseil à la mode, ces temps-ci, non? Parce qu’on est la génération du plaisir instantané, parce qu’on n’est pas réfléchi, parce qu’on veut tout trop vite.
C’est ça, mais est-ce bien vrai?
Prendre son temps. Bien sûr. C’est la chose rationnelle. C’est le conseil que tout le monde donne. J’ai aussi l’impression qu’on oublie un peu l’essentiel dans toute cette rationalité. On oublie que le cœur sait souvent des choses que la tête choisit d’ignorer. Il faut l’écouter, même s’il ne parle pas aussi fort que le reste. Même si la vie l’étouffe, souvent. Il est timide, le cœur, mais ça vaut la peine de le laisser s’exprimer. La voix la plus faible offre souvent le message avec le plus de portée.
Prendre son temps. Bien choisir un emploi, finir un bac qui ne nous motive pas sous prétexte qu’il est commencé. Prendre son temps, ne pas se pitcher dans un projet, puis un autre. Prendre son temps en amour. Toujours et encore en amour. Éviter d’aller trop vite : la vitesse blesse, le temps protège.
C’est bien, c’est beau, mais ça nous rend aussi passifs, non?
Parfois, il ne faut pas prendre son temps. Parfois, il faut se lancer. Dans un nouveau job, dans un nouvel amour, dans la vie, point. Quand une chose semble vraie, il ne faut pas la laisser filer. La vie est si rarement clémente. Ce serait dommage de laisser passer les rares fois où elle donne plus qu’elle ne prend.
Je parle de ces moments où on a ce feeling, ce sentiment qu’on a quelque chose ou quelqu’un au creux de nos paumes et qu’on ne peut pas perdre. Dans ces moments-là, ça serait tellement triste de le laisser filer sous prétexte qu’il faut prendre le temps d’y réfléchir. Si dommage de laisser la peur nous gagner, de choisir d’être sage ; dommage de se dire que c’est mieux de ne pas faire mal à l’autre. Il faut risquer d’être heureux, des fois. Le bonheur c’est un gamble et la vie est éphémère. Je ne veux pas mourir vieille et ridée et me dire que j’ai bien vécu, mais que je n’ai pas osé.
Je comprends qu’il y a des choses qui font que c’est difficile de se lancer, parfois. Il y a des situations auxquelles on n’a jamais été confrontées, des gens qui nous déstabilisent, mais, des fois, il faut simplement penser que ça marchera, prendre une grande inspiration et plonger.
Prenez l’amour. Ça revient toujours à l’amour.
On a peur de s’essouffler, on a peur que ça soit trop vite, trop tôt, mais on ne sait pas où on sera demain, on ne sait même pas si on a droit à demain. Moi, c’est maintenant que je veux vivre. Ici. La vie, c’est un lit, une fenêtre entrouverte, le frais dans la chambre, la chaleur entre les draps. C’est le corps de quelqu’un que tu connais mieux que tu te connais toi-même, ce sont les bras qui te font sentir en sécurité, c’est la certitude qu’un autre moment ne serait pas nécessaire – que celui-ci est assez. La vie, c’est le présent, c’est maintenant.
Oui, j’ai envie d’un futur. Je veux une famille greffée d’amis et de gens qui seront l’extension de moi. Je veux regarder autour de moi dans une salle comble et sentir que mon monde va exploser tellement il y a de l’amour, mais j’ai aussi envie de maintenant, tout de suite. Je veux cette impulsivité, je veux le défi, je veux les pas hésitants et la main tremblotante de quelqu’un avec qui je pourrai bâtir quelque chose qui n’existe pas encore. Je n’ai pas peur de la page blanche : je n’en ai jamais eu le syndrome.
Je sais qu’en osant, en plongeant, en vivant à grand coup de challenge, de nouveauté et de tout ce qui fait qu’on prend quelqu’un dans nos bras et qu’on n’a pas envie de laisser aller, on saurait faire une toile qui nous ressemble. Peut-être pas le genre d’art qui plaît à tout le monde, mais notre style bien à nous.
Je veux faire de mon monde une œuvre à mon image. Je veux oser, tout simplement.
Ce n’est pas grand-chose, quand on y pense. Juste oser un peu.
Osons.
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