Tout va bien, t’es heureux – tu goûtes le bonheur, mais tu sais que c’est temporaire : tu te vois déjà tout gâcher. Tu te vois déjà trouver un problème, créer un problème. T’as trop peur de manquer ce qui se passe ailleurs, autour de toi, dans la ville d’à côté, dans un autre pays. Ton bonheur ne peut pas être ici, il serait forcément meilleur ailleurs. Quand tu penses à ça, ton cerveau breakdown. En deux temps, trois mouvements, t’as pris tes jambes à ton cou, t’as mis les clés dans la porte et t’es partis – already gone. Tu te trouves imbécile, tu regrettes, mais pas, en même temps. T’essaies d’assumer ta décision : tu viens encore de cracher sur le bonheur. Tu ne peux pas t’arrêter de penser à ce qui se passe ailleurs, ce qui pourrait se passer si tu n’étais pas engagé dans quelque chose d’autre. Tu veux de l’exclusivité, mais ça te ferme beaucoup trop de portes. Comment gérer ça? Tu ne le sais pas. T’étouffes rien qu’à y penser. T’étouffes aussi à l’idée que tu n’arriveras jamais à survivre dans une routine de couple.
Une nouvelle histoire qui commence, je te vois aller ; tu sens le bonheur monter, l’anxiété aussi. L’usine à problèmes démarre. Ça peut tu slacker? Clairement, tu ne te rendras pas au prochain checkpoint. Je n’peux pas t’aider, bien malheureusement.
Tu n’es pas tout seul, regarde autour de toi – les gens fuient : en amitié, en amour, en famille. Les gens fuient toujours en espérant trouver mieux. Oui, en relations, mais aussi dans la vie de tous les jours. On est tous chez nous anxieux à se dire qu’on devrait sortir faire des activités, alors qu’on crave Netflix et le sommeil. On se sent mal. Est-ce qu’on est en train de manquer quelque chose? La soirée de notre vie? Une rencontre? Un événement?
C’est omniprésent, cette peur de manquer quelque chose. L’ouverture sur le monde par les réseaux sociaux et la télécommunication vient remettre en question nos habitudes et nos besoins relationnels. Les gens voient des problèmes où il n’y en a pas, l’insécurité les rend fou – la sécurité aussi. D’ailleurs, existe-elle encore? Le doute est envahissant, il est insidieux ; il est partout. Il n’y a rien de pire que l’impression d’avoir manqué une occasion qu’on aurait donc dû saisir.
Donne-toi l’occasion d’être heureux. Arrête de regarder autour de toi, vis le moment présent pis je te jure que tu ne manqueras jamais rien. Chaque chose se place. Mets la switch à problèmes à off, la switch à : « Je ne peux pas être stable même si j’le veux. »
Tu peux faire c’que tu veux, tu ne manqueras jamais rien. En attendant, laisse les choses se placer. Tsé, toi aussi, t’as le droit d’être heureux.
Par Annie-Claude Bergeron
Élodie Dugat
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