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C’était un après-midi à la fin mai.
Tu m’as écrit pour m’apprendre en primeur que c’était bel et bien vrai. Vous alliez déménager au cœur des aurores boréales le temps d’un posting.
Tu es femme de militaire, vous êtes famille de militaire.
Vous n’en êtes pas à votre première mutation et loin d’en être à votre dernière.
Pour réellement comprendre quel est l’impact de ce mode de vie, il faut le côtoyer quotidiennement pour réaliser combien il n’est pas facile. Autant pour l’entourage immédiat que pour la famille militaire elle-même.
Déménager, recommencer à zéro, s’adapter au nouveau milieu, s’y habituer enfin avant que la roue recommence. Et cette roue, elle peut revenir bien plus vite qu’on ne le croit.
Si j’en parle si aisément, c’est que j’en parle en connaissance de cause. Car, en plus d’avoir partagé votre quotidien durant presque 1 an et demi, je côtoie par le biais de mon emploi d’autres familles de militaires qui, depuis mon entrée en poste, ont déjà quitté après avoir reçu un message de mutation ou qui comme vous, quitteront cet été aux quatre coins du Canada et même à l’extérieur du pays.
Chaque nouveau départ d’une famille me donne souvent un léger pincement (surtout si j’ai eu la chance de travailler auprès des enfants), mais je ne peux pas nier que votre départ sera mon plus difficile, car je fais partie de cet entourage immédiat.
Mais bon, le but de ce texte n’est pas d’expliquer de fond en comble le mode de vie militaire, car il y en aurait long à dire. Non, à la place, je t’écris ce texte pour parler de notre amitié.
Nous nous connaissons depuis plusieurs années, mais cela ne fait que quatre ans que nous nous surnommons les non-amies ou les amies, en fonction de l’humeur, sérieuse ou non, que nous avons.
En quatre ans, il s’en est passé des choses : un countdown pour mon retour au Québec, notre cohabitation (encore aujourd’hui je ne sais jamais si je dois dire maison #1 ou #2, et toi?), un projet « secret » où tu m’as dit que tu serais présente lorsque je le pousserai puisqu’il n’est pas si bête, des embûches, des fous rires, des Chocolats Favoris dates et j’en passe.
Avec votre départ imminent, t’entendre dire « nenette », « Go! Go! Go! », te voir faire tes tics de « cette situation me rend folle » vont réellement me manquer. Ça, et nos compétitions à savoir qui de nous deux seraient capables de mettre une chanson dans la tête de l’autre en premier! Bon, à ce sujet, c’est définitivement ton conjoint le meilleur. Combien de fois, il s’est fait un malin plaisir à m’en mettre dans la tête, dont celle avec une marmotte qui m’a permis d’avoir 99 % dans un examen?
Entendre les enfants me demander d’aller sauter sur le trampoline avec eux en faisant attention à mon dos malade, faire des cabanes de couvertures, faire des séances photos et m’occuper d’eux comme le ferait une tatie vont aussi me manquer.
Si je résume notre amitié, je l’imagerais de cette façon : une clé accompagnée de son cadenas.
Avec le temps, nous avons construit une confiance et une écoute inouïe l’une envers l’autre. Nous avons bravé des tempêtes et des remises en question. Nous nous sommes aidées mutuellement pour qu’ensemble nous puissions déverrouiller petit à petit tous les cadenas de nos soucis.
Je sais que, malgré la distance qui nous séparera durant ce posting, nous serons toujours là, prêtes à combattre le froid polaire des Territoires et l’humidité étouffante du Québec afin que cette amitié unique puisse perdurer, jusqu’au prochain posting où nous devrons apprendre à apprivoiser de nouveau la distance, qui pourrait être tout aussi loin qu’aussi près.
Dans une semaine, vous nous quitterez pour cette aventure ! Je veux vous dire en toute simplicité que je vous aime et que j’espère qu’une petite place m’attendra lorsque je viendrai voir avec vous les aurores boréales danser au-dessus de nos têtes.