Depuis que j’habite seule en appartement, je réfléchis davantage à la répercussion de chacun de mes actes sur le monde dans lequel je vis. La crise qui sévit à l’heure actuelle amplifie mon questionnement. D’accord, aujourd’hui, je sais ce que je dois faire au quotidien : me laver les mains, me distancier socialement, m’adapter aux nouvelles mesures mises en place par l’université… Mais après? Est-ce que ce qui allait de soi auparavant redeviendra forcément la norme, ou certains changements imposés par cette pause globale s’imposeront-ils dans notre quotidien?
Déjà, pour soutenir l’économie d’ici, on voit déferler une vague d’amour envers les entrepreneurs locaux : agriculteurs québécois, restaurateurs du coin et commerçants de proximité répondent en offrant de nouveaux services de livraison et de commerce en ligne. Et si le réflexe d’acheter local s’implantait officiellement dans nos habitudes à la suite de ce confinement? Les bienfaits sont nombreux autant pour nous, clients, que pour les propriétaires de ces entreprises. L’achat d’un nouveau maillot de bain créé et fabriqué au Québec ou d’un café moulu par un microtorréfacteur de la région représente bien plus qu’une simple transaction. C’est aussi une expérience humaine, l’occasion d’un service plus personnalisé, qui fait ressentir une immense fierté. Et ça permet de stimuler l’économie locale!
D’ailleurs, le coronavirus aura également fait se manifester une entraide et une solidarité communautaires fort touchantes. Cet altruisme devrait prévaloir sur le nombrilisme si commun au 21e siècle. Ne devrait-on pas toujours prévoir du temps pour prêter main-forte aux organismes de bienfaisance, pour appeler nos aînés ou pour tout simplement offrir son aide et son support à quiconque semble en avoir besoin?
Les populations confinées un peu partout dans le monde et l’activité économique au ralenti ont de réelles conséquences — positives pour une fois! — sur la pollution atmosphérique. Un exemple simple : la Chine, plus grande émettrice de gaz à effet de serre dans le monde, a vu ses émissions chuter d’au moins un quart entre le 3 février et le 1er mars 2020 comparativement à l’an dernier, selon une estimation du Centre for Research on Energy and Clean Air. Cependant, on ne peut se réjouir tout de suite. Après la crise financière de 2008, un rebond considérable des émissions de CO2 avait suivi, camouflant tout à fait la baisse qu’elle avait apportée. La solution pour que cela ne se reproduise? Obtenir un engagement ferme des gouvernements à agir. La prédiction du nombre élevé de décès causés par la COVID-19 a poussé les autorités à agir rapidement, malgré les perturbations importantes sur la vie quotidienne de leurs citoyens. Pourquoi redoutent-elles de repenser le système pour ne pas défaire nos petites routines? Selon l’Organisation mondiale de la Santé, entre 2030 et 2050, « les changements climatiques devraient causer environ 250 000 décès supplémentaires par an ». Ce chiffre ne sonne-t-il pas une alarme également? Et les scientifiques le disent aussi : plus l’environnement se dégradera, plus des épidémies comme on en vit présentement auront lieu…
Parlant de repenser notre système économique, cette pause dans la vie courante ne serait-elle pas un bon moment pour réfléchir sérieusement à aller vers une croissance limitée, à remettre en question le concept de PIB? Les entreprises aussi devront fort probablement s’adapter. Le télétravail et la transformation numérique ne sont pas d’actualité qu’en cette période de distanciation sociale. Il est à prévoir que les employés auront pris goût à cette nouvelle manière de travailler, leur permettant davantage de concilier travail et vie privée, et que les consommateurs ayant accès à du contenu en ligne plus facilement ne voudront pas retourner en arrière.
Je ne suis ni experte en économie, ni en environnement, ni en politique. Mais mon statut de citoyenne du monde m’incite à prendre cette occasion de recul pour réfléchir à ce que je souhaite pour la suite. Pour que la « normale » soit plus réfléchie et moins monnayable. Ça vaut le coup de s’y arrêter.
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