Nous étions conviés au Clap, à la première de Cyclotron, le nouveau film d’Olivier Asselin. À l’image de la carrière cinématographique d’Asselin, Cyclotron nous amène dans un univers hors norme rarement exploité chez les cinéastes québécois : celui de la seconde guerre mondiale.
Pour ce suspense historique à caractère science-fictionnel, nous sommes transportés dans la course des camps nazis et alliés pour l’obtention de l’arme nucléaire. Le réalisateur a pertinemment déceler toute la singularité de ce qui a trait aux enjeux scientifiques de l’époque. Ainsi, de grands esprits normalement retirés dans l’abstraction des calculs, dans des spéculations bénignes, se retrouvent, par la force des choses, au cœur d’enjeux éthiques dont les conséquences sont mondiales.
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Et, à ce compte, Cyclotron remporte son pari audacieux, celui de s’être courageusement lancer dans la représentation d’un univers bien particulier, malgré un budget limité. À bord de ce train (lieu presqu’exclusif du film) qui file inexorablement vers une catastrophe – sera-t-elle alliée ou nazie? –, nous avons bel et bien l’illusion du passé. Les costumes, le train lui-même, les façons de se tenir des acteurs, le ton menaçant des dialogues, la hiérarchie bien sentie; tout concourt à recréer le triste passé des années quarante. L’alternance entre le noir et blanc et la couleur rehausse également la crédibilité du film
C’est lorsqu’il tente d’exploiter les théories de la physique quantique que l’œuvre bute quelque peu. La mécanique quantique avance que les particules peuvent se trouver à deux endroits en même temps, pourvu que l’on n’ait pas encore tenté de localiser celles-ci. Théorie complexe qui mystifie un peu le spectateur. Le nœud du film s’articulera, esthétiquement autant que thématiquement, sur la diversité des mondes possibles. Ainsi, Asselin tente de faire un parallèle entre la physique quantique (dédoublement des particules) et les choix philosophiques qui peuvent changer le cours de l’histoire. Au final, l’effet est parfois réussi, parfois moins bien. Disons aussi que la longue exploitation de ce nœud fictionnel nous préparait à une fin plus grandiose.
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La performance des acteurs Paul Ahmarani, Lucille Fluet et Mark-Antony Krupa est honnêtement très intéressante. Dans un entretien d’après-film, on apprend, éberlués, qu’Ahmarani ne parle pas allemand, alors que la moitié du film se déroule dans cette langue. Les postures correspondent à l’époque, le ton également. Seul petit bémol : nous n’arrivons pas à sentir toute l’urgence, via leur jeu, de la situation que relate le film – c’est quand même Berlin ou Paris qui s’apprête à sauter.
Somme toute, un film très intéressant. Un suspense qui s’étire parfois un peu, un sujet complexe et difficile à suivre, mais le film qui charme tout de même par l’univers qu’il recrée, par son audace et par l’unité thématique dont il fait preuve. Ainsi, la pertinence du film est bien visible et les intentions du cinéaste demeurent transparentes malgré la complexité des enjeux dont il traite.
Bon cinéma!
Par David Morissette Beaulieu et Pascale Hubert
Bande-annonce de Cyclotron