Choisir le papier, la plume, s’asseoir et attendre que se pose de lui-même le prétexte.
Cher toi,
Je ne t’écris pas exactement parce qu’il le faut, mais rien que pour écrire. Autrement, surtout, écrire ces choses qu’on ne prend plus toujours le temps non seulement de partager, mais de penser. Je t’écris parce que nos boîtes à malle ne sont pas bonnes qu’à se gaver de coupons rabais et de pubs.
Notamment, je te demande comment tu vas. Mais je ne demande pas juste pour demander, je demande parce que, mine de rien, ça m’intéresse. Je te jure.
Comment ça va?
Et c’est sincèrement, vraiment, que…
J’espère que tu vas bien.
Je t’écris parce que je pense à toi, comme ça, pour tout comme pour rien. D’une intimité à l’autre, je t’écris des miettes de vie, avec mes mots choisis, rien que pour toi choisis, je te raconte un bout de moi.
Je pourrais te parler de thé, te raconter le genmaicha ou encore louer le gyokuro. Je pourrais te parler des lunes de Jupiter, d’Io la volcanique. Je pourrais te parler de l’étrange impression d’avoir vu dans le bus un personnage de mon cru. Je pourrais te parler de ma dernière lecture, de Larry Tremblay. Je pourrais te parler de mon chat, juste pour parler de mon chat. Je pourrais te parler de pelleter du brouillard. Je pourrais te parler de voyages, je pourrais rêver.
Je pourrais aussi te parler de ça.
Ma lettre à toi, comme un signe de main qui ne requiert pas nécessairement de réponse.
Ma tentative de correspondre. Au pire, mon monologue.
Je pourrais bien te parler de correspondance, oui… De ces liens qui prennent encre dans le blanc des mots qu’on se dédie. Entre amis, entre parents, entre amants ou entre peu importe ce qu’on est. Sinon ces étranges qui s’accordent encore le temps de se raconter les choses sans raccourcis. Pour peu ou pas de raisons, pour le plaisir de se recroqueviller en marge du temps un moment, de se raconter des affaires qu’autrement on ne se dit pas, de raviver la bonne vieille bosse de l’écriture, d’écrire bien ou d’écrire mal…
D’écrire tout court.
Bien à toi,
Moi
Par Sarah M Tambo
Marie Lortie Côté
Photo de couverture : Source