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Avoir le goût d’se crisser en feu

Bonsoir Hubert Lenoir et à tous les Hubert du monde,

Je voulais t’écrire lundi, mardi aussi, mais tu vois, la vie va si vite parfois que j’avais juste pas le temps de mettre de l’ordre dans mes idées et de trouver les mots justes pour te dire ce que je pense, ou plutôt ce que je ressens. Frustration, peur, peine, admiration; je savais juste plus vraiment ce que c’était.

Tu sais, Hubert, quand je t’ai vu dans l’extrait de Tout le monde en parle du 14 octobre, j’ai eu des émotions. Ben plein d’émotions. Premièrement, parce que ton extravagance est à donner des frissons, mais ça, c’est rien par rapport à ton authenticité.

Cette semaine, tu as abordé les sentiments humains en direct à la télévision; les Dany Turcotte de ce monde les auront confondus avec provocation et manque d’attention. Ils auront manqué une merveilleuse occasion d’engager un dialogue plus que sincère, plus que nécessaire.

« J’ai un peu l’goût d’me crisser en feu, ces temps-ci. » La sincérité avec laquelle tu l’as dit était frappante – pas de questions à se poser, tu le ressentais vraiment, ce sentiment-là.

Tu n’as même pas idée de l’impact que ton affirmation, aussi simple qu’elle t’ait paru, aussi naturellement qu’elle te soit venue, aura engagé des micros-dialogues entre des gens et leur entourage. On pourra, grâce à toi, non pas parler uniquement de suicide, mais de santé tout simplement. On pourra parler des hauts et des bas de la vie, et d’être honnête avec soi-même.

J’peux te le dire, ça m’est arrivé aussi de la sentir, l’envie d’me crisser en feu. Plus qu’une fois. C’est arrivé à beaucoup de gens autour de moi. Certains l’ont même fait.

Se crisser en feu. Se crisser en feu, ça peut vouloir dire bien des affaires, pas juste littéralement s’immoler. Ça peut vouloir dire arrêter de manger tranquillement, arrêter de voir les gens qu’on aime, cesser de créer. Se crisser en feu, ça n’arrive pas juste comme ça, un lundi matin. C’est un sentiment qui évolue dans le temps, qui est intolérable certaines journées, et qu’au contraire, on oublie parfois lors de moments de bonheur, d’eaux douces.

« On dit pas des affaires de même, Hubert. » La froideur, la logique; le robotisme presque de ces paroles.  Ben non Hubert, quand on feel pas on ne le dit pas. On garde ça pour nous. Pas le droit de péter la bulle de bonheur artificielle québécoise où 3 Québécois par jour se suicident.

Eille! Qu’on se le dise : quand on ne peut plus parler des sentiments humains, des ressentis, des impressions, de notre nature fondamentalement humaine, de quoi on parle? Parle-moi d’une preuve de société malade ça.

Laissez-moi vous le dire, et je parle au nom de tous ceux qui ont envie de se crisser en feu, qui connaissent des gens qui ont envie de se crisser en feu et qui connaissent des gens qui se sont crissé en feu : s’il y a bien une chose dans la vie qu’on veut savoir au sujet des gens qu’on aime, c’est s’ils ont envie de se crisser en feu; s’ils vont bien, s’ils sont corrects, s’ils ont besoin de support, de se changer les idées ou d’aide, carrément.

La pression qu’on vit au quotidien peut être extrêmement lourde à porter, les changements difficiles à accepter, et la vie, carrément pas toujours cool; même si on est blancs (ben oui). Le suicide est un vrai problème dans notre société, et de dire en direct à la télévision que « on ne parle pas d’affaires de même », c’est carrément insulter la mémoire de ceux qui sont partis, nier le mal vécu par ceux qui veulent se crisser en feu, et une sérieuse atteinte aux gens endeuillés par le suicide.

Merci, Hubert, d’avoir parlé pour tous ceux qui ont envie de se crisser en feu. Merci d’avoir essayé fort de pas être seul là-dedans. Merci de pas peser tes mots pis de dire comment tu te sens. Merci de pas avoir peur de brusquer les gens. Merci d’ouvrir le dialogue.

Pour finir, j’aimerais dire : « On dit pas des affaires de même, Dany. »

Source photo de couverture

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