Quand j’ai quitté le foyer familial à 15 ans pour aller jouer au hockey dans le cadre d’un programme Sport-études à Baie-Comeau, ma mère braillait dans le cadre de la porte d’entrée pendant que mon père cordait mes bagages dans l’char avant d’me donner maladroitement un bisou sur la joue. Tommy pis Manon, y’ont toujours été d’même. Ils nous ont toujours encouragés, mon frère pis moi dans la poursuite de nos rêves, en acceptant toujours les sacrifices qui viennent avec.
Si moi j’ai toujours eu une passion pour les études, c’était bien différent pour mon frère. C’est pas qu’il a des difficultés à l’école, au contraire, mais j’imagine que c’est pas facile pour tout le monde de rentrer dans le moule, de s’inscrire au cégep et de faire un choix de carrière à 17 ans. Comme il ne savait pas trop où tout ça le menait, mais surtout, comme il refusait de penser à autre chose qu’au motocross, mes parents et lui ont convenu qu’il prendrait une année sabbatique après sa première année de cégep pour lui permette de se retrouver un peu et par le fait même, de pratiquer son sport de manière plus intensive.
Sam à 4 ans
À l’automne dernier, mon frère n’est donc pas retourné à l’école. À la place, il a travaillé à temps plein dans une shop de moto pour piler un peu de cash. Ça faisait déjà un bout qu’il harcelait mes parents pour partir dans le sud des États-Unis avec sa van et ses deux motos, mais c’était loin de faire l’unanimité. Si mon père était plutôt en accord, ma mère, elle, voulait rien savoir que son garçon de 18 ans parte tout seul aux States, avec rien d’autre que ses motocross et son mince portefeuille. Ça n’a toutefois pas empêché mon frère de se faire des scénarios et de prétendre qu’il passerait l’hiver en Floride. Faut savoir que Sam est un éternel rêveur entêté et qu’il finit toujours par arriver à ses fins, même les plus improbables. C’est d’ailleurs quelque chose que j’admire chez mon p’tit frère, mais aussi que je lui envie.
Ladite van
Entre temps, à l’automne, mon père a appris que l’usine où il travaillait allait fermer. C’était pas très surprenant, étant donné les rumeurs de fermeture qui se sont répandues au cours des dernières années, mais ça a tout de même été un coup dur pour un bon nombre de familles de la région. Mon père a donc perdu sa job à la mi-janvier. Évidemment, ça l’a fait chier. C’est un événement malheureux et une grande source de stress pour notre famille, mais plutôt que de s’apitoyer sur notre sort, mes parents, qui m’ont toujours répété que rien n’arrive pour rien, ont plutôt vu ça comme une opportunité : mon père avait maintenant des congés pour accompagner mon frère dans son périple.
Ça fait que mon frère et mon père sont partis aux p’tites heures du matin dans une tempête de neige avec le VR familial et un trailer fermé en arrière, emmenant dans leurs bagages un set de tire de spare et la sauce à spag de ma mère. Sam, qui avait dans l’idée de partir depuis un bout, s’était informé durant l’été auprès d’autres coureurs pour connaître les meilleurs spots où aller. Évidemment, il a oublié la feuille sur laquelle il avait soigneusement écrit son itinéraire et les pistes où ils devaient se rendre. Ouin, y’est d’même Sam. C’est un peu pour ça que ma mère voulait pas qu’il parte tout seul.
À l’heure où on se parle, ça fait déjà plus de 3 semaines qu’ils sont partis. On se parle sur FaceTime régulièrement et ils post des photos de leur trip sur Facebook presque tous les jours. Ma mère et la blonde de mon frère doivent aller les rejoindre en mars (pendant que moé j’t’à l’université). Mon frère fait de la moto tous les jours pis mon père qui a toujours haï l’hiver se promène en shorts, cueille des oranges et mange de la crème glacée. Ils ont rencontré plein de gens qui partagent la même passion qu’eux et ils passent du temps privilégié ensemble.
Quand mon père fait à souper
Vis ta vie dans le danger
Sam et Tommy
Sam et la propriétaire d’une piste en Caroline du Sud
Je les envie, mais je les admire aussi. Je trouve ça inspirant de voir mon p’tit frère aussi passionné avoir autant de détermination. Il a compris depuis longtemps que l’important dans la vie, c’est de croire en soi et en ses rêves, peu importe ce que les autres en pensent.