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À la nouvelle blonde du gars que j’ai aimé

Salut!

Je sais qu’on se connait pas, alors de commencer avec un salut-point-d’exclamation c’est peut-être un peu too much, mais on dirait que j’arrivais pas à faire semblant parce qu’au fond, je te connais quand même un peu.

J’ai tellement entendu parler de toi, il m’a tellement parlé de toi, j’ai passé tellement de temps à étudier ton Instagram pis à conclure que t’es une fille ben plus plein air que moi à voir tes photos au Maroc pis en Islande à faire de la grande randonnée pis des expéditions avec de l’équipement pis un look sport expert pis toute pis toute.

Et j’imagine que c’est un peu pareil pour toi, tu me connais pas, mais tu me connais un peu.

Je sais pas trop ce que j’arriverais à te dire si tout ça arrivait en vrai, si tu étais là devant moi, dans ton corps, ton visage et ta sensibilité si différente de la mienne, à attendre que je sois à la hauteur de ce qu’on t’a dit de moi, à attendre que je sois pas si intimidante que ça finalement, à attendre l’anecdote que tu raconteras à tes amies après.

Si tu étais là devant moi, je te sourirais sûrement à distance, pour avoir l’air cool et détachée, ou bien je te donnerais deux becs en appuyant mes joues sur tes joues et en complimentant tes jeans taille haute avant de m’éloigner dans un malaise palpable.

Je sais pas trop ce qu’on aurait à se dire au fond. On est juste liées par un gars au fond. Juste ça. Toute ça.

Je pense que si je vivais dans un monde où je pourrais te dire tout ce que je veux, j’oserais sûrement te dire que je suis un peu jalouse.

Pas parce que je m’ennuie. Pas parce que je veux m’infiltrer dans quoi que ce soit.

Je suis jalouse parce que je sais à quoi ça ressemble d’être bien avec ce gars-là, et ça, c’est dur à partager.

Bon. Je sais aussi à quoi ça ressemble d’être vraiment pas bien avec ce gars-là aussi, mais ça, on dirait que j’ai plutôt tendance à l’oublier, et rapidement.

Parce que c’est donc beau la nostalgie des beaux moments hein, c’est donc réconfortant. Tandis que les bouts rough, on finit toujours par se dire « c’était pas si pire que ça finalement » ou « on se pognait pas tant que ça », pis c’est là qu’on se met un doigt dans l’œil, parce que si c’était pas si pire que ça, on serait encore avec, et c’est pas le cas.

Alors je voudrais te dire, prends soin des beaux moments. Prends soin des rires, des insides, des manies qu’il fait que tu commenceras à faire toi aussi, malgré toi, parce que tu le trouves drôle et brillant et que l’amour c’est grand pis fusionnel.

J’voudrais te dire « inquiètes-toi pas de moi », mais je sais pas si je le pense vraiment. La partie pas fine en dedans de moi, celle qui roule les yeux devant un enfant qui pleure et qui faisait de l’intimidation malgré elle au primaire, cette partie-là de moi a envie que tu t’inquiètes de moi, pour me sentir forte et puissante et invincible et supergénialecool.

J’ai été cette nouvelle blonde-là à qui une ex est venue dire « inquiètes-toi pas, on est vraiment juste des amis ». Pis cette ex-là était tellement pas juste une amie et j’aurais tellement dû plus m’inquiéter, même si je crois pas que ça aurait changé le cours des choses que je m’inquiète, j’aurais peut-être juste été plus prudente, j’aurais fait plus attention à mon estime et à ma capacité d’aimer, ça m’aurait sûrement permis d’avoir moins de peine après.

Alors j’ai pas envie de te dire ça, parce que ça ressemble trop souvent à un mensonge, j’ai plutôt envie de te dire « fais-toi confiance ». Ce que vous avez, ça vous appartient juste à vous. Ça sera jamais ce qu’on avait pis c’est justement pour ça que ça marche, pis c’est peut-être même ce pourquoi ça va durer.

Je suis pas encore à l’aise, pas encore cool avec l’image de vous deux au resto à la fête de son père, collés et tendres et souriants à travers sa famille, mais ça viendra.

C’est juste parce que je sais à quel point c’est un bon gars. Je sais qu’il est spécial, que c’était spécial. Je sais que ça va me prendre longtemps pour arrêter de penser à lui chaque fois que je retourne en banlieue souper chez mes parents pis qu’il est pas avec moi. Pis c’est pas parce que j’ai des sentiments actifs, c’est plus parce que c’est un chemin tracé que je connais par cœur. C’est parce que le souvenir est encore clair et en couleur, pas encore en noir et blanc.

Mais toi, t’as pas les souvenirs, t’as les moments présents, alors t’as pas à t’en faire, les souvenirs c’est normal, c’est beau pis ça fait grandir, ça fait apprendre de nos erreurs. En tout cas, moi, ça m’a fait apprendre des miennes. C’est ça qui fait que les relations amoureuses peuvent jamais être des échecs.

Pis je suis sûre que t’es une fille cool, c’est sûrement ça le pire, ou le mieux.

Une fille sensée. Une fille qui prendra soin. Une fille qui fait pas semblant. Une fille douce avec des yeux qui brillent d’amour. Une fille claire dans ses sentiments. Une fille qui lui fait du bien.

Pis ça, tout ça, ça me rassure, même si ça rend ça plus compliqué de t’haïr. Parce qu’au fond, même si j’aimerais mieux pouvoir me valoriser en me disant que je suis mieux que toutes les filles qu’il pourrait avoir dans sa vie, ce que je crois le plus profondément c’est que ce gars-là mérite beaucoup d’amour, alors si tu lui en donnes beaucoup, je vais finir par être capable de dire que je suis contente pour vous, parce qu’au fond je le suis, même si je suis une grande orgueilleuse compliquée avec moins d’estime de moi que je laisse paraître pis que ça serait donc plus facile de chialer sur toute.

Mais je me connais, je te dirai jamais tout ça et je vais plutôt choisir de te semi-sourire à distance en me disant que t’as des beaux jeans taille haute mais en osant jamais te l’admettre.

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