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commotion cérébrale

Cet automne, j’ai eu un véritable wake-up call : une commotion cérébrale. Il suffit parfois de quelques secondes pour qu’un accident bête bouleverse notre vie. Le 3 octobre dernier, alors que je parlais de mon blues des dernières semaines à une amie, je me suis cogné la tête sur le bras en bois de son sofa. Je me suis relevée, confuse et hilare, en disant : « Peut-être que je me suis replacé la déprime! » C’était moins drôle le lendemain, lorsque les maux de tête ont fait leur nid et que la fatigue s’est emparée de moi, transformant la moindre tâche quotidienne en fardeau. En bonne guerrière que je suis, j’ai passé plus d’une semaine à tenter de travailler comme si de rien n’était. Puis, le diagnostic est tombé : traumatisme crânien, arrêt de travail et repos complet jusqu’à ce que ça passe.

Je suis ressortie du bureau du médecin complètement sous le choc. Assise sur le trottoir, rue Sherbrooke, j’ai fondu en larmes. Deux semaines sans travailler… Comment mes collègues feraient alors que j’avais une tonne de travail? Et mon compte en banque? À ce moment, ces deux petites semaines m’apparaissaient comme la pire tragédie. Le malheur qui me tombait dessus, la fin du monde, quoi.

J’étais loin de me douter qu’il me faudrait six semaines d’arrêt avant de pouvoir reprendre le travail progressivement. Au moment où j’écris ces lignes, deux mois après l’incident, je viens tout juste de recommencer à temps plein et je n’ai toujours pas retrouvé 100 % de mes capacités. Comment trouver du sens lorsque ce genre d’événement nous arrive alors qu’on se sentait déjà prête à craquer? Malgré ma résistance initiale, j’ai fini par lâcher prise et comprendre ce que la vie tentait de me dire depuis déjà trop longtemps.

Dans notre société qui roule à 100 milles à l’heure, nous avons perdu l’art de ne rien faire et, par conséquent, celui du silence aussi. Lorsque le médecin m’a dit que j’avais besoin de 48 h de repos complet, sans aucune activité intellectuelle, en évitant les interactions sociales et en ne faisant que le strict minimum de mes tâches quotidiennes, je n’avais pas compris à quel point cela serait difficile. Les lumières fermées, mes bouchons aux oreilles, je n’avais d’autre choix que d’utiliser mon cerveau le moins possible pour lui permettre de guérir. Puis, j’ai pu reprendre tranquillement certaines activités : 10 minutes de lecture, un appel, écouter une chanson, passer le balai, marcher jusqu’au coin de ma rue… Autant dire que les journées étaient interminables, mais plutôt que de lutter, j’ai compris que mes nuits de 12 heures et mes siestes du midi guérissaient non seulement mon cerveau, mais tout mon être qui avait accumulé tant de fatigue et de blessures émotionnelles. Déjà au cours des derniers mois, mon corps me suppliait de me reposer : prise de poids inexpliquée, anxiété, fatigue, chutes de pression, douleurs musculaires, manque de motivation et perte d’intérêt pour les choses que j’aime. Les semaines qui ont précédé ma commotion, j’ai annulé au moins la moitié de mes sorties, préférant rester couchée en boule dans mon lit.

Je ne pouvais me résoudre à consulter un médecin, ayant trop peur de me retrouver en arrêt de travail, me disant que je ne pouvais pas abandonner mon équipe. J’avais plutôt pris la décision de me tourner vers les antidépresseurs pour survivre à ce rythme de vie effréné et remonter la pente… mais je me suis cogné la tête juste avant. Prescription en main, la pharmacienne m’a conseillé d’attendre. Voilà la réponse que la vie m’a faite. Je devais me mettre en priorité et arrêter de brûler la chandelle par les deux bouts. Et petit à petit, au fil des jours passés à regarder l’hiver s’installer depuis ma fenêtre, j’ai compris. J’ai compris que ma valeur n’était pas déterminée selon ma productivité, ma santé, mon métier ou le nombre de fois que je fais du yoga ou que je vois des amis par semaine. Je ne pouvais rien faire de tout ça, mais j’étais en vie quand même. Et je ne valais pas moins.

S’il y a bien quelque chose qu’on ne contrôle pas, c’est la maladie et les blessures. On peut tout faire pour les éviter, mais on n’en sera jamais à l’abri. C’est la même chose avec la guérison. Il faut accepter que cela n’aille pas aussi vite qu’on le voudrait, que les rechutes font partie du processus. Il faut respecter son rythme même si ça signifie qu’il faut renoncer à tout le reste. Ce n’est que lors de mon troisième rendez-vous chez le médecin que j’ai accepté ses conseils sans « négocier » un arrêt plus court qui, plutôt que de favoriser un retour rapide, me foutait la pression et donc retardait ma guérison. C’est à partir de ce moment que j’ai vu une nette progression de mon état et que chaque jour est devenu une petite victoire. Il n’y a pas de mot pour décrire comment je me suis sentie la première fois que j’ai réussi à faire une salutation au soleil ou à faire l’épicerie sans m’asseoir.

En plus de toutes ces réalisations, ma commotion cérébrale a été une véritable détox forcée. Pas d’alcool, pas d’écrans, pas de sorties. Mes maux de tête violents m’ont aussi encouragée à ne plus boire de café, chose impensable pour moi auparavant. En revanche, je dors maintenant plus tôt et je prends le temps de cuisiner en prenant soin de consommer tous les nutriments nécessaires chaque jour.

Au terme de cette aventure, ce temps d’arrêt que la vie m’a amené, je sens que j’ai grandi. J’ai été suffisamment seule avec moi-même pour entendre ma petite voix pleinement. J’ai pu faire le point, fermer définitivement certains dossiers et comprendre que d’autres ont tout simplement encore besoin de temps. Mais pour la première fois de ma vie, j’ai su ce que c’était de ne pas courir après le temps. J’ai goûté au bonheur du moment présent, n’ayant rien d’autre que du self-care à l’agenda.

Surtout, je sais maintenant que je suis ma priorité, que je vaux plus que mes responsabilités, que le monde continue de tourner sans moi et que je dois cesser de me pousser à bout et de nager à contre-courant de mon intuition tout le temps. Et ça, c’est le plus beau cadeau que je pouvais recevoir. Merci donc à ma commotion cérébrale. Grâce à toi, je sais que tant que je n’embrasserai pas le slow living en faisant tous les changements que ça implique, je ne pourrai atteindre cette fameuse paix intérieure à laquelle j’aspire tant.

Source photo de couverture : Unsplash

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