Tiens, là. Ce petit mot de rien du tout.
Perfection.
Ce désir parfois conscient, mais le plus souvent inconscient, de vouloir bien faire. De bien paraître. De vouloir qu’on nous perçoive comme un tout sans faille. Sans fragilité.
Être parfait.e.s à l’école, au travail, dans nos relations, dans l’image que nous projetons, dans les disciplines que nous pratiquons, comme parent, comme enfant, être parfait.e.s comme apprenant, comme enseignant, comme modèle, comme partenaire…
Maudit, quand ça nous pogne les tripes. Quand le paraître l’emporte sur l’être. Un peu plus de fard sur nos joues, un peu plus de noir sur nos yeux, mais surtout pas sous. On masque la douleur, on masque les pincements. On masque tout au fond, du plus léger au plus profond.
On troque le vrai pour un peu plus de faux. Pour une illusion flatteuse, on couvre les rougeurs, on cherche la lumière, faut que ça soit lisse pis faut que ça brille.
Mais pas par superficialité ou par mesquinerie.
On le fait, guidé.e.s par un désir profondément inconscient de se montrer à son meilleur. On le fait pour suivre cette voie tracée par tout ce qu’on voit.
Partout, des visages heureux, des couleurs vives et des confettis.
Des réponses préfaites aux craintes d’ennuyer ou de déranger l’autre, on se dit que c’est pas normal de pas bien aller. Que c’est pas normal d’avoir de la graisse ou des vergetures, d’avoir des cernes ou d’avoir de la peine.
Ça fait qu’on fait un peu semblant.
Un sourire de plus par-ci, un coup de pinceau de plus par là, ça ne devrait pas faire de mal.
Parce qu’il faut être fort.e.s, faut être belles et beaux, faut être brillant.e.s et émerveillé.e.s, faut répondre aux attentes, jamais décevoir, faut être multitâches et exceller dans tout, finir de travailler, préparer le souper, aller s’entraîner. Faut être grand.e.s mais pas menaçant.e.s, faut être belles et beaux, mais pas superficiel.le.s, faut dire oui aux aventures, mais dire non à nos envies. Faut aimer manger sans être gourmand.e.s, faut savoir s’exprimer sans trop parler.
Maudite perfection. Maudites contradictions. Les « faut » deviennent du faux qui nous coupent le souffle.
C’est assez, là, me semble. Humains que nous sommes, on le sait très bien, que ce sont des standards inatteignables. On le sait. Fait que c’est le temps de briser le miroir des apparences et de s’aimer.
S’aimer. Avec notre graisse, nos cernes, nos rougeurs, notre gourmandise, nos peurs, nos éclaboussures, avec nos écailles et notre peine.
C’est parfois difficile. OK, souvent. Ouin, pas mal tout le temps.
Mais faut mettre autant d’efforts dans l’amour de qui nous sommes réellement que dans les efforts que l’on met pour se maquiller les yeux et se maquiller le cœur.
Tu es belle, tu es beau. Dans tes passions et dans tes contradictions.
Pis vraiment, c’est ça, la perfection.
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