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Cette crainte de ne jamais avoir d’enfant

J’ai 32 ans.

J’ai pas d’enfants.

C’est pas grave.

Avoir un premier enfant dans la trentaine ce n’est plus un cas médical sérieux et rarissime, comme il y a quelques décennies seulement.

40 est le nouveau 30.

30 est le nouveau 20.

20 est le nouveau… non, on va s’arrêter là.

Donc, pas de stress. J’ai trouvé l’père, c’est déjà ça! On n’est pas pressé. On attend juste d’être un peu plus setté. Tout va bien!

Pourtant, il y a cette peur qui est là. Cette peur de ne jamais être mère. De passer tout droit. Qu’il soit déjà trop tard.

Dans mon entourage, certaines personnes font face à de grandes épreuves, des maladies graves, des cancers, des ménopauses hâtives, qui mettent un terme douloureux à leur désir de maternité. Des gens qui luttent contre l’infertilité, l’incompatibilité, l’insémination qui ne fonctionne pas toujours, les grossesses difficiles, les fausses couches à répétition. Des couples de même sexe qui font preuve d’une incroyable résilience, malgré les multiples étapes, les embûches, les longs processus de procréation assistée et d’adoption coûteux et, malheureusement, le jugement encore présent de certaines personnes arriérées.

Tout ça suscite en moi un mélange d’admiration et d’angoisse.

Je me sens vieillir, je le sens le fucking tic-tac, mais en même temps, j’ai l’impression de ne pas être tout à fait prête. Faut dire qu’un salaire stable aiderait à ce que je me sente prête, mais si j’attends après ça, ça se peut que j’attende longtemps, tsé veut dire!

Pis là, on s’entend, je ne dis pas qu’il faut absolument vouloir ou avoir des enfants. C’est tellement correct de ne pas en vouloir, d’être convaincue, de douter, de se questionner, d’attendre.

Mais moi je sens une certaine urgence qui me fait rusher. Est-ce que ça part de quelque chose d’intrinsèque ou la pression vient de ce qui m’entoure? Je l’sais pas! Un peu des deux probablement.

Un maladroit gynéco m’a dit à mon dernier examen :

– Je dois vous dire que, de l’extérieur, quand je vous regarde, je vois une jeune et jolie demoiselle. Mais d’un point de vue biologique (au moins il n’a pas dit : « mais de l’intérieur »), dit-il donc, vous êtes… une vieille femme.

Heu… fuck you docteur!

Il poursuit comme si c’était pas suffisant :

– 32 ans, sans aucune grossesse, c’est un peu tard. Il faut pas attendre trop longtemps. Le corps est de moins en moins fertile et productif, vous savez!

Oui, je sais. Mange un char.

Tu peux pas dire ça à ta patiente. Surtout si c’est la première fois que tu la vois. Tu sais pas si elle vient juste de se séparer, si elle veut des enfants depuis super longtemps, mais que pour toutes sortes de raisons, ça ne fonctionne pas. Tu ne connais pas ses peurs, ses angoisses, son historique. Tu ne sais même pas si elle est fertile ou non. Tout ce que tu connais, c’est l’état de son col pis même là, pas tant encore, faque farme ta yeule sur le reste!

J’ai pensé déposer une plainte, mais il était quand même sympathique malgré son manque flagrant d’aptitudes sociales! Il voulait juste me prévenir des risques j’imagine.

Je sais pas ce qui va se passer niveau maternité. C’est une chose qui ne se contrôle pas tant, étonnamment. Une chose que je sais, c’est qu’il y a 32 ans et quelques, ma mère de 38 ans mettait au monde son premier et seul bébé (moé!) C’était pas très commun dans les années 80 et elle était suivie de près, césarienne, toute le kit!!  Elle a été (et est toujours) une mère formidable, dynamique et aimante que je n’échangerais pas pour une plus jeune. Je suivrai peut-être ses traces… ou pas… On verra.

Source photo couverture

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