J’ai longtemps réfléchi avant de publier ce texte en mon nom et pas de façon anonyme. J’ai été inspirée par Bell Cause pour la cause, une noble initiative à mon avis, qui rend accessible le vécu de gens en lien avec leur santé mentale, plus spécifiquement ces temps-ci, puisque le 30 janvier, ce sera la journée Bell Cause pour la cause. Je crois, cependant, qu’il faudrait parler de santé mentale tous les jours, pas seulement le jour de Bell Cause pour la cause.
Vous pouvez d’ailleurs lire le témoignage de personnes inspirantes juste ICI.
Comme future intervenante, je souhaite réduire la stigmatisation et les préjugés entourant la santé mentale et ça commence avec moi-même. C’est gênant, mais je sais que ça ne devrait pas l’être. Plus on va en parler, plus ça va devenir la norme de parler de santé mentale avec nos proches.
Je vous raconte aujourd’hui mon histoire, en espérant que ça encourage d’autres personnes à demander de l’aide, parce que la souffrance ne devrait pas être taboue, qu’elle soit physique ou psychologique.
Cette histoire est la mienne, je parle par expérience. Je ne suis pas médecin, donc veuillez consulter un professionnel de la santé si vous en ressentez le besoin.
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Oui, j’ai souffert d’anorexie. La fille performante à l’école et sportive que je suis a déjà souffert d’un trouble alimentaire.
Me peser était rendu aussi banal que de me brosser les dents. Je ne comptais pas les calories, mais je savais très bien la valeur des aliments, même sans calculer. Souffrir d’un trouble alimentaire, c’est avoir une petite voix dans sa tête qui nous dicte quoi faire. Ma petite voix, elle me disait que j’étais trop grosse, que je devais me priver. Lorsque mon côté rationnel essayait de reprendre le dessus, ma petite voix me disait que j’allais devenir grosse si je m’écoutais. À chaque livre perdue et à chaque grandeur de jeans en moins, le côté malade de moi gagnait du terrain. J’étais rendue minuscule. J’avais le teint blême, les joues creuses. Je n’avais plus d’énergie. Mon cerveau ne réfléchissait plus correctement.
La guérison, c’est un processus en dents de scie. Il y a des hauts et des bas.
Me réalimenter adéquatement a été difficile, vraiment difficile. Au début, manger était une corvée, littéralement. Tout goûtait le carton brun. Je ne retirais aucun plaisir à manger, incluant le chocolat, les chips et les bonbons. Je mangeais surtout pour faire plaisir à mes proches. Ainsi, je mangeais seulement en leur présence pour les rassurer. Je ne savais même pas pourquoi je voulais maigrir. Avec du recul, je comprends que c’est parce que je voulais avoir du contrôle sur quelque chose. Me restreindre était ma façon de prendre le contrôle alors que je sentais que je n’avais pas de contrôle sur ma vie.
J’ai eu un suivi médical qui a permis de surveiller mes signes vitaux et mon poids. J’ai toujours été limite. Limite sur le poids, limite pour les signes vitaux. J’ai dû prendre des suppléments pour combler mes carences alimentaires. Je vous confirme que ça ne goûte pas très bon et qu’un gâteau au chocolat est bien meilleur que ces suppléments.
Ce n’était pas une vie. Plus tu perds du poids, plus tu veux en perdre. C’est en quelque sorte addictif. J’ai vu des nutritionnistes, elles m’ont aidée à gérer le volet alimentaire, mais je devais faire un bout de chemin seule pour comprendre d’où tout cela venait. Avec mon médecin, je me suis donné des petits objectifs à atteindre. Prendre 200 grammes en une semaine me semblait une montagne. À un moment donné, je voyais que je ne parvenais pas à reprendre du poids uniquement en mangeant davantage. J’ai alors demandé à mon médecin une médication pour m’aider avec ma reprise de poids. À ce moment, j’ai voulu me laisser une chance de guérir pour vrai. Bonne nouvelle : cela a fonctionné pour moi. Plus de distorsions, plus de restrictions, plus de goût de carton dans la bouche.
C’est parfois tentant d’être un peu plus maigre, un peu plus ci, un peu plus ça, mais l’important, c’est de rester vigilant et d’en prendre conscience. Dorénavant, ma santé est ma priorité, avant l’école, avant tout le reste. Le plus beau cadeau, c’est de pouvoir faire du sport pour le plaisir, sans penser aux calories brûlées. Je savoure les aliments, je découvre le plaisir à cuisiner les saveurs. Mes amies me trouvent drôle, mais lorsque je vais à l’épicerie, les chips ont toujours leur place dans mon panier.
Il y a de l’espoir, ne l’oubliez jamais. À 22 ans, je peux enfin dire que je suis guérie de l’anorexie et j’en suis fière.
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Si vous souffrez, demandez de l’aide. Je vous promets que c’est possible de guérir. Ce n’est pas facile, mais ce sera toujours mieux que de souffrir. Vous pouvez contacter l’organisme Anorexie et boulimie Québec, votre médecin ou un intervenant du CLSC le plus près de chez vous.
Donc, le 30 janvier, j’espère que vous vous joindrez à moi et que vous causerez pour la Cause.
Pour chaque message texte, appel mobile, appel interurbain, tweet avec le mot-clic #BellCause, visionnement de leur vidéo ou utilisation du filtre Snapchat et Facebook lors de la Journée Bell Cause pour la cause, Bell versera 5 ¢ pour des initiatives en santé mentale.
Crédit photo couverture : Camille Fortin
Références :
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