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En souvenir de toi

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Ma belle grand-maman d’amour…

Depuis quelques semaines, je ne pourrais pas dire pourquoi, mais tu me manques plus qu’à l’habitude. De croiser ton regard espiègle, de devoir faire avec toi tes mille et un cannages avant que la saison froide arrive (même si je venais à être agacée de cette tâche), t’entendre me dire « la doudoune, la doudoune, la doudoune ». Tout ça et bien d’autres choses de toi qui me manque terriblement.

La dernière fois que nous nous sommes parlées de vive voix, c’était le jour de ton anniversaire. C’était la première depuis toujours que je ne pouvais pas te souhaiter bon anniversaire en personne. Ton ouïe te jouait de plus en plus de tours à l’époque et parler au téléphone devenait de plus en plus un irritant pour toi car tu avais énormément de difficultés à nous entendre.

Pourtant, cette journée-là, nous nous sommes comprises, sans que j’aie à élever un peu le ton.

Ce jour-là, je m’en souviendrai pour le reste de ma vie. Nous avons toutes les deux versé des larmes, car nous nous manquions. Maman était témoin de cette scène, tenant son cellulaire sur le haut-parleur et je le sentais à distance qu’elle était impuissante face à cela, mais reconnaissante de vivre ce beau moment entre une grand-mère et sa petite-fille.

Et les mois se sont écoulés…

Je me souviendrai toujours de cet après-midi chaud de juillet, lorsque maman m’a téléphoné pour me dire que si je voulais venir te voir une dernière fois avant que tu nous quittes, que c’était maintenant.

Ça m’a fait un choc, car à peine une heure après cet appel, tu étais déjà partie en quelque sorte… tu étais simplement là, semi-consciente à attendre que ton dernier souffle arrive.

Cette dernière semaine sur terre, tu l’auras passée avec tes deux enfants et moi qui avons veillé à ton chevet, en nous remémorant de merveilleux souvenirs, des chansons que tu as aimé nous apprendre. Tout ça entre les rires et les pleurs un peu en cachette car nous ne voulions pas montrer notre vulnérabilité. Nous voulions être forts pour les uns pour les autres, comme tu l’as été pour nous dans les épreuves que la vie nous avait amenées.

Tu ne pouvais plus parler, mais laisse-moi te dire que moi, je t’ai parlé énormément car c’est la seule chose que je pouvais faire. D’ailleurs, je fus la seule qui réussissait à te calmer lorsque tu recevais tes antidouleurs par intraveineuse. Je venais m’étendre à tes côtés en prenant tes mains dans les miennes. Tu avais beau ne plus être totalement là, l’inconfort et le désir de te défendre y demeuraient durant ces moments-là…

« Je le sais ma belle petite grand-maman d’amour que tu n’aimes pas ça, que c’est douloureux, mais dis-toi que je suis là avec toi, comme toi tu l’as été pour moi petite à l’hôpital. Promis, ils ne te feront pas de mal… »

Ah ma belle grand-maman d’amour!

Cela a fait récemment quatre ans que tu nous as demandé si tu pouvais aller rejoindre ta mère et ton père au ciel. Après ton décès, j’ai longtemps vécu avec les sentiments de culpabilité et de regret. Celui de n’être pas venue te voir avant lorsque je suis revenue au Québec. D’avoir attendu, parce qu’au fond, ça ne me tentait pas tant que ça de venir te visiter, parce que je n’avais pas la force émotionnelle pour le faire…

Petite, je me souviens que tu m’as offert le livre « Un petit souvenir de moi » de Bosak et McGaw.

Au début, je t’avouerais que je ne l’aimais pas du tout, ça ne captait pas du tout mes intérêts de lecture que j’avais à l’époque. C’est avec les années que j’ai compris l’essence même du livre : ton vouloir à me laisser ton héritage, oui parfois matériel, mais surtout l’héritage de ton vécu.

Comme, j’aurais aimé pouvoir te donner la chance de connaitre les joies de te faire appeler mémère par mes enfants, juste pour t’entendre nous dire « m’a t’en faire une mémère ». À défaut de ne pas avoir pu t’offrir ce cadeau, je te promets, le jour que j’en aurai, je leur dirai que les recettes de cuisine que nous faisons ensemble, que c’est toi qui me les a apprises (y compris les recettes libanaises) et que certaines d’entre elles, c’est ta mère qui te les a apprises. Je leur dirai que tu étais réputée pour faire la meilleure sauce à spaghetti, puisqu’elle a su traverser les années avec les amis de tes enfants, ainsi que les miens.

Je leur dirai ça, mais je leur dirai aussi que tu étais connue pour ton fort caractère, dont, aux dires de certains, j’aurais hérité. Mais sais-tu quoi? Ça me va, car je sais qu’avec ce caractère, je saurai réaliser de grandes choses comme tu as su le faire. En fait, je leur dirai énormément de choses de toi, car tu as su nous donner comme héritage les valeurs de la famille, de la détermination, du partage, de la débrouillardise, bref un héritage riche qui surplombe l’aspect matériel.

De là-haut, j’aime croire que tu nous regardes poursuivre notre petit bout de chemin, d’être là, à nous regarder réaliser nos rêves, car s’il y a bien un autre truc que tu nous auras appris, c’est de toujours avoir espoir.

Continue à veiller sur nous et à nous écouter comme tu sais si bien le faire entre deux séances de chatouilles de la « bébitte elle monte ».

Ta doudoune.

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