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corona virus

Hey gang, j’ai un scoop pour vous : y’a un danger imminent pour la santé à l’échelle planétaire. En fait, y’en a plusieurs, mais le plus grand, c’est la crise écologique.

Mais là, ça fait une coup’ de mois qu’on entend parler d’un autre danger, moins grave mais plus concret, plus rapide, avec des solutions qui ont des retombées tout aussi rapides et concrètes : le coronavirus. J’ai longtemps fait partie de ces personnes nonchalantes qui disaient : « C’est pas pire que la grippe. On a capoté pour l’Ebola y’a pas si longtemps pis la plupart des gens ont survécu. La faim et la haine des femmes tuent plus que ces virus combinés. » Y’en a d’autres qui ont acheté des caisses de masques N-95 avant même que les cliniques et les hôpitaux en ressentent le besoin, ce qui fait que certains centres médicaux québécois ont quatre masques pour treize médecins, sept infirmières et six secrétaires. Mettons que les deux attitudes sont nuisibles de façon différentes.

Pis dernièrement, des mesures draconiennes ont été mises en place pour faire face au virus : fermeture des écoles, quarantaine forcée ou fortement suggérée de voyageureuses, de personnes âgées ou atteintes de maladies chroniques, interdiction de rassemblements, préparation d’équipes médicales en cas d’irruptions du virus, pis c’est loin d’être fini.

On va encourager les gens à rester chez eux, à se laver les mains plus souvent, à éviter de toucher leur propre visage, à se tenir à plusieurs mètres de distance les un.es des autres, tout ça pour éviter la contagion. On essaie déjà de sensibiliser le plus de gens possible en expliquant la fameuse courbe de contagion (le Pharmachien la vulgarise super bien) pour que les conseils de santé publique soient respectés.

Mais comme pour la crise écologique, la plus grande arme est le manque d’éducation. Moins les gens en savent, moins ils se mobilisent efficacement, plus le danger gagne du terrain et plus nos chances de survie rapetissent.

Y’en a qui préfèrent rire des faiseureuses de réserves de papier de toilette que de partager les informations pertinentes. C’est normal, l’humour permet de détendre l’atmosphère. Mais si on se penche un peu sur les comportements des gens paniqué.es, on peut trouver des racines qui reviendront dans d’autres contextes. La peur du manque, motivée par une méfiance envers le gouvernement, par une certitude que le système ne s’occupera pas d’eux aussi bien qu’iels le voudraient, par la réalisation que le pouvoir d’agir est maintenant et non quand la crise sera pire, cette peur viscérale motive à ne penser qu’à soi, à être au paroxysme de l’individualisme. C’est l’instinct de survie.

C’est très logique que des gens qui ont un stress financier important soient les premier.ères à se lancer sur les denrées non périssables. Ce n’est pas quand les prix augmenteront, que l’offre sera plus petite et que ça fera des semaines qu’iels auront reçu leur chèque d’aide sociale ou qu’iels n’auront pas travaillé à cause d’une quarantaine forcée que ces gens pourront s’approvisionner selon leurs besoins. Les riches et les économes ont le luxe de ne pas stresser à payer leur épicerie chaque semaine et, par le fait même, celui de ne pas avoir encore enclenché leur mode « survie » face à un danger qui est moins imminent pour elleux que pour d’autres.

Y’a aussi des gens qui chialent sur les mesures gouvernementales. C’est vraiment poche, annuler un voyage, décaler sa session d’étude, ne plus avoir accès à des installations sportives. Je vous feel, la gang. Mais je m’inquiète ben plus pour mon père asthmatique, ma grand-mère de quatre-vingt-huit ans et demi (la demie est super importante) et mon amie qui a le pire système immunitaire que j’ai vu de ma vie et qui, pour une grippe qui m’a clouée au lit 24 heures, a passé six jours complets à somnoler et à manger de la soupe.

Que ce soit par risque de complications si elles attrapent le virus ou de ne pas avoir accès aux soins récurrents dont elles ont besoin à cause d’un engorgement du système de santé, les personnes atteintes de conditions médicales particulières sont celles à qui il faut penser quand on se prive d’aller au karaoké ou au gym, quand on se lave les mains avant et après avoir fait son épicerie, quand on est déçu.e que le show d’humour qu’on voulait tant voir soit reporté indéfiniment.

En Italie, y’a fallu que des gens choisissent parmi les personnes arrivées aux urgences pour soigner celles qui avaient les plus grandes chances de survie (source : RT France, 2020). Quand j’aurai un accident de voiture et que, parce que j’ai 24 ans et que je suis sportive et en bonne santé, une médecin débranchera une femme de 66 ans nouvellement grand-mère du petit Thomas de son respirateur pour que moi, je survive, ben je vais en vouloir ben gros à toustes celleux qui auront été au centre d’achat pour autre chose que l’essentiel et qui seront collectivement responsables du décès de cette femme qui aurait pu voir son petit-fils et ses plates-bandes fleurir si seulement on avait respecté les mesures préventives que conseillaient fortement les expert.e.s en santé publique.

Dans la même veine, j’en veux à celleux qui peuvent agir pour ralentir la crise écologique et qui ne le font pas. Je remercie le coronavirus de mettre en lumière que c’est possible, ralentir le capitalisme et sa destruction massive de l’espèce humaine. J’en veux aux dirigeant.es qui se mobilisent seulement quand leur survie est menacée par la mort des autres et non quand la survie de la majorité est en péril.

Parce que, rappelons-le, le coronavirus ne tuera pas la majorité des gens. Environ 3,5 % des personnes infectées décèdent (source : Organisation mondiale de la santé), alors que la grippe est sous le 1 %, et maximum 70 % de l’espèce humaine sera infectée (source : Québec Science), donc moins de 10 % de la planète devrait en mourir, et l’écrasante majorité des décès sera chez les 50 ans et plus, surtout les personnes atteintes de maladies cardiovasculaires, du diabète ou d’un cancer (source : Sciences et Avenir). Pendant ce temps, la crise écologique touchera éventuellement toute l’espèce humaine, décime déjà des espèces animales par milliers, et même les pays du nord global en ressentent maintenant les effets, que ce soit des inondations plus importantes et fréquentes, des canicules plus meurtrières, des feux de forêts impossibles à éteindre ou des récoltes de plus en plus pauvres.

Ce qui fait qu’on se mobilise pour le coronavirus, c’est que la meilleure façon pour les riches de s’en sortir, c’est que moins de gens l’attrapent. Parce que les riches ne sont pas complètement isolé.es des pauvres et que, sans traitement médical encore prouvé efficace (source : Québec Science), il n’est pas possible d’acheter sa survie. Par contre, il sera toujours possible pour les richissimes d’acheter leur survie face au réchauffement climatique, que ce soit en déménageant, en s’armant, en faisant des réserves, même que couper les vivres aux autres fera certainement partie des stratégies d’ici quelques décennies. Les riches n’ont pas intérêt à protéger la planète contre le réchauffement climatique, puisque c’est l’industrialisation qui en est l’accélérateur monumental et que cette même industrialisation les enrichit, donc leur fournit davantage de pouvoir pour faire face à cette crise.

Et pour ajouter encore plus d’ombre au tableau, demandons-nous si la panique générale engendrée par le coronavirus donne une idée des comportements qu’auront les individus quand la crise écologique engendrera des crises de plus grande ampleur, par exemple quand les récoltes ne seront réellement plus suffisantes ou que l’accès à l’eau potable sera menacé?

Si le coronavirus peut avoir une seule utilité, j’aimerais qu’on en retienne quelque chose, qu’on apprenne de nos erreurs et qu’on se prépare collectivement pour faire face à la plus grande menace de l’humanité : la crise écologique. Si nos gouvernements peuvent se mobiliser face à une pandémie et reconnaître que le capitalisme sauvage n’est pas la meilleure solution pour que l’espèce humaine survive, pourquoi ne pas amorcer une transition écologique à long terme? Prévoyons les catastrophes à venir, parce qu’il y en aura d’autres, et demandons des mesures structurantes et coopératives, car sans entraide organisée, ce ne seront pas les dirigeant.es qui perdront au change, mais bien nous, qui avons moins de pouvoir de changer les choses, donc moins de chances de survie.

Je sais que je suis très privilégiée de pouvoir assez me distancer de la crise virulente pour la théoriser et la comparer à un autre phénomène. Si t’es trop stressé.e live pour penser à ça, prends soin de toi first (n’oublie pas les recommandations du Gouvernement du Québec!) et on jasera après.

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