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Ce que la police n'entendra jamais

Source: Unsplash

Dans la vague de dénonciations qui déferle présentement sur les réseaux sociaux, nous voyons le laid et le très laid. Nous lisons les histoires de celles et ceux qui seront marqué.es à jamais par des événements traumatisants où leur consentement a été bafoué. Nous lisons celles et ceux dont le corps a été utilisé. Nous voyons que derrière le sourire charmeur de nos influenceur.euses préféré.es et de nos ami.es se trouvent des individus qui ont cruellement besoin de se remettre en question, et surtout, d’admettre leurs comportements d’agresseurs.

« Mais c’est juste ça qui est arrivé ?» 

Une phrase que certain.es entendent lorsqu’elles et ils prennent la courageuse décision de dénoncer, après s’être déconstruit.es et rebâti.es à la petite cuillère. L’invalidation. Parce qu’il parait qu’il faut avoir vécu l’horreur pour être entendu.e. Le système est blanc ou noir. Le consentement se doit d’être un « non » explicite… Mais en dehors du système judiciaire, le monde entier est gris. Chaque fxmme aurait une histoire à raconter. Toutes n’ont pas été violées. Toutes n’ont pas lavé leur honte en pleurant sous la douche pour la troisième fois de la soirée. Et encore est-il que même l’horreur ne reçoit parfois pas les conséquences appropriées.

Pourquoi les choses sont-elles ainsi ? Parce que la police entend le crime. Elle entend le viol. Elle entend la victime qui a refusé explicitement et dont le refus n’a pas été écouté. Elle entend celle qui a dû utiliser le set d’agression sexuelle (S.A.S ou rape kit) des urgences.

Elle n’entend pas celle qui ne veut plus porter sa jupe préférée par peur de se faire toucher à nouveau, parce que la dernière fois lui a confirmé ses craintes. Celle qui ne court pas en top de sport, quitte à suer à grosses gouttes, parce que se dévêtir, c’est « courir après le trouble » (asking for it). Elle n’entend pas celle qui a peur de recevoir une demande de message sur Instagram après avoir reçu une neuvième dick pic non désirée. Elle n’entend pas celle qui s’est fait convaincre de dire oui, mais dont le corps figé criait son refus. Celle qui a eu peur de dire non, parce que l’agresseur était son copain. Elle n’entend pas non plus celle qui vit dans un corps plus gros et qui voit ce dernier être fétichisé par des inconnus sur Internet, à qui on dit de perdre du poids si elle veut arrêter de se sentir comme un objet servant à assouvir des fantasmes.

Parce que, concrètement, que ferons-nous ? Nous ne poursuivrons pas tous ceux qui cat callent, tous ceux qui nous touchent, qui nous frôlent et qui nous font sentir mal à l’aise. Nous bloquons ces individus en tendant le problème sur un plateau d’argent à la prochaine victime qu’ils choisiront. Et nous savons pertinemment que ce n’est qu’une question de temps avant qu’un autre plateau ne nous soit tendu et que la prochaine victime, ce soit nous. Nous racontons à nos amies le lundi matin comment cette personne nous a touchées au bar le vendredi soir précédent, supposément pour nous complimenter. La situation doit être prise à la légère, parce que qui se plaint d’avoir reçu un compliment ? Est-ce une marque d’appréciation que de toucher quelqu’un sans son consentement ?

Mon premier baiser a été sans que je m’y attende et surtout, sans que je sois d’accord. J’en ai ri et je l’ai pris comme une anecdote. Jamais je ne me suis demandé si un tort avait été causé. C’était simple à mes yeux : il a sûrement pensé que je le voulais parce que JE l’ai mené sur une fausse piste. J’aurais dû être claire. Et ça, c’est l’exemple parfait de la culture du viol : la normalisation d’un comportement à caractère sexuel inapproprié, simplement parce qu’il est ancré dans la société et que nous n’y voyons plus un problème. Et surtout, la prise du blâme, parce que c’est à moi d’être claire et non à lui de se questionner sur mon consentement.

Voyez-vous, aujourd’hui, la police entend parfois le viol…mais elle n’entend pas la culture du viol.

On ne peut pas porter une société au complet devant le tribunal et la sanctionner à changer sa vision du monde. Les problèmes sont partout : dans les paroles dénigrantes pour la femme des chansons populaires, dans l’accusation des victimes d’avoir détruit la carrière de leurs agresseurs, dans l’appellation « menteuse » lorsqu’une victime raconte son histoire, dans l’humour noir, dans la peur de marcher seule le soir en tant que femme, dans le langage courant et violent tel que « j’ai été violé par cet examen. » etc.

Finalement, ce que j’aurais envie de te dire, c’est que peu importe ce que tu as vécu, tu es valide. Ne pas vivre le pire ne signifie pas ne rien vivre du tout. La zone grise est remplie d’événements traumatisants qui peuvent te marquer, peu importe la gravité. Tu as le droit absolu à l’aide, au soutien et à l’écoute. Ne l’oublie jamais.

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