Habituellement, lorsqu’une année s’achève, j’essaie d’en faire la rétrospective pour voir si le tout a été fructueux. Avec l’année qui vient de se terminer, je sais d’avance que ça ne sera pas simple, compte tenu de tout ce qui est arrivé. Mais ce qui suit ne sera ni un pamphlet politique ni un raz-de-marée de mauvaises nouvelles; au contraire, j’aime bien voir les choses de façon positive, contrairement aux médias (je blague…).
Janvier : le mois des résolutions et des ambitions. Je décide, sur un coup de tête, de passer mes journées à travailler mon piano et à dormir en attendant le début de la session au cégep. Durant mon temps libre, je commence le montage d’un documentaire tourné la session dernière dans l’espoir de le terminer pendant les vacances. Peine perdue, celui-ci n’est toujours pas terminé à ce jour, et au piano, je travaille tout sauf mon répertoire officiel. Ah, les vacances… quelle plaie.
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Février à avril : la reprise des cours. Officiellement, j’entame une session à onze cours répartis dans deux établissements différents. Audacieux, téméraire, kamikaze? Malgré tout, je tente l’expérience, avec l’idée que, puisque c’est ma dernière session au collégial, il faut que je savoure ce moment. Mes soirées sont agrémentées de deux à trois heures d’exercices au piano, suivies d’un souper tardif et puis d’une période d’étude qui se poursuit jusqu’à ce que la fatigue l’emporte. À y repenser, c’était pas si pire que ça, plutôt agréable, même. Je trouve qu’il y a quelque chose de paisible dans toute cette surcharge.
Mai : la fin des cours. Officiellement, une session à onze cours répartis dans deux établissements différents est un suicide. Une épreuve de courage. Malgré tout, je traîne mon corps sans vie chaque matin dans l’autobus, où je m’affaisse sur un siège avant de m’endormir littéralement dans les nanosecondes qui suivent. Le sommeil est réconfortant, sauf lorsque je me fais réveiller en sursaut par la voix irritée du passager d’à côté, irrité parce que j’ai confondu ses genoux avec un doux oreiller. Le reste est de l’histoire. Des souvenirs épars me reviennent de cette période floue. La remise bâclée d’un mémoire sur la mémoire, le son apaisant de Beethoven au violon, le ravage de Fort McMurray par un incendie dévastateur, les négociations pour projeter un documentaire, qui n’ont finalement pas abouti.
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Entre toutes ces choses, c’est sans doute ma participation à un concours scientifique qui m’a le plus marqué. Le but était, très sommairement, de construire un véhicule utilisant l’énergie éolienne, et seulement trois équipes — en comptant la nôtre — s’étaient inscrites. Le jour de la remise, la première équipe, composée d’une seule personne, arriva avec une canette de Red Bull transpercée de part et d’autre par deux petites baguettes en bois sur lesquelles étaient fixées des roues. Le tout était baptisé « Projet de la veille », parce qu’évidemment, il avait été fabriqué la veille. Mais l’engin était incomplet : il manquait une voile, vous savez, la partie « énergie éolienne » du concours, que son créateur avait sans doute reléguée au second plan. Dans un élan de panique, celui-ci arrache d’un geste vif la page couverture d’un prospectus de l’Université Laval et la colle avec du scotch tape sur la canette de Red Bull. Il se lance ensuite dans un discours glorieux vantant les mérites de son véhicule « commandité par l’Université Laval » et « virevoltant, parce que Red Bull donne des ailes ». Le gars était en délire, et la foule était en délire, mais visiblement pas pour les mêmes raisons; inutile de dire que le véhicule n’aura fait que le 1/10 du trajet avant de s’immobiliser.
La deuxième équipe se présente avec un imposant engin de plus d’un mètre de haut. Et quand je dis imposant, c’est de loin, car en l’examinant de proche, on constate que celui-ci était constitué de trois manches à balai, de duct tape, et d’un système de poulies où la corde était d’origine artisanale — c’est-à-dire fabriquée à partir de lacets de souliers attachés ensemble — et où le poids lui-même était… un haltère. Bon, il faut leur accorder que, côté écolo, cette équipe remportait certainement la partie. Mais au moment du départ, sous la pression de l’haltère, visiblement trop forte pour les squelettiques manches à balai, le tout s’effondre devant les yeux ahuris des étudiants spectateurs. Une belle attraction de foire.
Je dis tout cela, mais notre propre équipe n’avait guère fait mieux. Notre engin, fabriqué à partir de briques LEGO, ne parvenait à revenir sur ses pas comme les règles l’imposaient. Mais comme nous étions la seule équipe ayant réussi à parcourir la moitié du trajet sans transgresser les règles, le comité organisateur n’eut le choix de nous attribuer la première place. Quelle ironie.
Juin : le début glorieux des vacances. C’est l’heure du camp de vacances de chimie organique, heu, je veux plutôt dire, du cours d’été de chimie organique. Un cours totalement facultatif que je décide d’entreprendre encore une fois sur un coup de tête. S’en suivirent trois semaines de pur plaisir (de régurgitation de matière), de moments paisibles (d’insomnie en raison du stress) et de sorties luxueuses au restaurant (à l’épicerie Métro du coin, parce qu’à 21 h le soir au cégep, sans bouffe, j’avais faim). En sortant de mon camp de vacances, je suis ébahi, le monde est ébranlé par le départ de la Grande-Bretagne de l’Union européenne.
Juillet : les folles vacances d’été. Mais SURTOUT, la folie Pokémon Go. La solution à l’obésité américaine, à l’isolement social et la cause numéro un de la détérioration des piles de nos téléphones. Honnêtement, j’ai rarement vu autant de gens dehors les soirs de semaine dans mon petit quartier résidentiel.
Août : le temps des Jeux olympiques. La piscine verte de Rio, inoubliable. Les quatre médailles d’Oleksiak, encore plus. Le visionnement des jeux m’a redonné la piqûre du sport. Une piqûre qui n’aura duré longtemps, certes, mais bon, le temps d’une aventure sous le soleil calcinant qui s’est occupé de ma carence en vitamine D.
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Septembre : le début de la vie universitaire. Le début de la fin, quoi. Ce sera une histoire pour un autre temps.
Octobre à décembre : écrasés dans les divans du salon des résidences de l’université, nous avons assisté, impuissants, à la montée en puissance du dictateur Trump. Je me suis ennuyé du piano. J’ai fait semblant de le travailler. J’ai essayé d’étudier, mais la procrastination était plus forte que moi. Je suis allé voir le nouveau Harry Potter au cinéma, j’ai été déçu. Je suis allé voir le nouveau Star Wars, j’ai joui. J’ai pleuré la mort de Leonard Cohen, Carrie Fischer, et encore celle d’Alan Rickman, David Bowie, Christina Grimmie, et bien d’autres qui ont malheureusement quitté ce monde en 2016. J’ai encore fait semblant de travailler mon piano. La vie semblait devenir un chouia répétitif.
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Il était temps que 2017 arrive.
Par Foan Song
Geneviève Lamoureux
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