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Une histoire de priorité pis de bonheur

Je suis divorcée.

Je suis maman. Maman trois fois.

Et je suis heureuse.

Sauf que pour une bonne flopée de gens, ces faits-là, additionnés, donnent la permission de dire un gros tas de conneries. J’ai une bonne carapace, mais maudit que des fois, ça me pogne en dedans. Que des fois, ça me déchire l’intérieur. Que des fois, ça me prend tout pour que mes yeux ne se mouillent pas.

C’est humain, de juger, d’avoir un avis, de penser qu’on aurait fait mieux, ou fait pire, ou whatever. Mais depuis ma séparation, remarque anodine devient trop souvent remarque assassine. Y’a des mots qui brûlent. Qui s’infiltrent dans chaque cellule de ton corps et qui éteignent un bout de lumière en toi.

Je n’aurai jamais ton courage. / Je ne voudrais pas que mes enfants vivent cela. / Pourquoi as-tu eu des enfants si c’était pour finir de même? / Des fois vaut mieux tougher, tsé. / Avant les gens ne se quittaient pas pour des p’tites chicanes. On réglait nos problèmes. / C’est pas plus vert ailleurs. / C’est pas un peu égoïste, ça? / Tu vas trouver ça dur, à long terme. / J’espère que tes enfants ne t’en voudront pas trop plus tard.

Tu arrêtes de respirer un peu, tu réponds du mieux que tu peux et tu continues ton chemin, parce qu’il le faut et parce que ta vie, tu la trouves belle quand même, même si elle ne suit pas le pattern standard.

Pis un moment donné, pouf! Ça te frappe. Des étoiles dans tes yeux. Tes joues qui rougissent. Pis t’as la chienne, mais tu te rends compte que tu es amoureuse. Tu fonces. Tu le dis pas trop, mais ça paraît dans ton visage, dans tes mouvements, dans ton sourire. Et finalement, les mauvaises langues ont un prétexte tout frais tout chaud pour se délier. Le « j’espère que tes enfants vont rester ta priorité » en plus du regard qui essaie de te déstabiliser, j’y ai goûté.

Mes kids sont terriblement précieux. Je les aime, pis y’a rien qui va faire vaciller cet amour-là. Ils sont ma priorité, oui : quand vient le temps de m’occuper d’eux, je me dédie à ces p’tits êtres. J’aime ça, leur cuisiner leur repas préféré et le manger avec eux et rire à table de n’importe quoi. Sortir au parc. Mettre des chaussures dans des pieds mous. Les aider à se moucher d’octobre à mars. Aider mon plus vieux dans ses devoirs. Name it. J’suis une maman comme les autres, avec ses forces et ses faiblesses, avec le doute constant : je fais bien ou pas ? Je lève le ton des fois, pis je regrette après. Je m’ennuie d’eux quand ils dorment, même si j’avais hâte qu’ils se couchent parce que la tornade du soir était de force 8000.

Sauf qu’il faut comprendre que des priorités, j’en ai d’autres, aussi. Quand je suis au boulot, par exemple, ben c’est ça, ma priorité. Ma job, si je ne l’avais pas, je ne serais pas qui je suis, je ne serais pas aussi épanouie. Je dois en faire une priorité, aux bons moments. Si on me téléphone « madame, votre fils a vomi trois fois en 20 minutes, venez le chercher s’il vous plaît », bien sûr, il devient à nouveau ma priorité. C’est pas une ligne droite. Les gens le comprennent, ça, parce que tsé, monoparentale avec trois enfants, elle doit travailler la fille.

Côté cœur, par contre, on dirait qu’ils ne catchent pas. Mais cet amoureux, il contribue salement à mon bonheur. Et oui, il est ma priorité aussi! Et je veux qu’il le sache. Parce qu’il compte. Qu’il est un gros morceau de c’te paquet de choses qui me rendent heureuse. Me blottir avec lui sur le divan. Tenir sa main. Faire un p’tit cocon douillet juste pour nous deux. Autant parler avec lui du prochain resto que j’aimerais découvrir que de lui raconter la dernière niaiserie de ma fille. Cette beauté-là, les gens la jugent trop. « Ouais, mais oublie pas tes enfants dans cette histoire-là. » Hein?! Je serais encore en couple avec le père de mes enfants, on me dirait de ne pas oublier de prendre du temps juste pour nous et de se retrouver comme avant les enfants.

Y’a pas juste du méchant pis du pas beau, y’a de l’amour aussi. Je le sens, le soutien de mes amis. De mes parents. Même s’ils ne comprennent pas tout. Ils me tiennent la main et me guident dans cette nouvelle vie.

Mes enfants, ma priorité.

Mon amoureux, ma priorité.

Mon boulot, ma priorité.

Nettoyer le plancher quand il est sale, une priorité aussi. Y’a personne qui aime avoir les pieds qui collent en marchant.

Mon bonheur et celui de ceux qui partagent ma vie, ma priorité.

Vous êtes crissement bons, papa et maman séparés. Vous jonglez avec les hauts et les bas de la vie mieux que n’importe quel saltimbanque. On fait tous de notre mieux, même si on se sent inadéquats, parfois. Il ne faut pas l’oublier, tout comme il ne faut pas s’oublier, nous non plus. Good job, vous autres.

(J’vais avoir une pensée toute particulière pour vous dans le temps des Fêtes. À chaque remarque poche d’un parent éloigné ou pas, on a juste à se dire que tiens, c’est peut-être pas trop grave si on oublie d’avertir la personne en question que notre enrhumé de 4 ans a omis d’éternuer dans son coude et que des p’tites gouttelettes ont sûrement atterri dans la trempette son assiette… Ben non. J’niaise. Ou pas.)

Par Marylène Kirouac

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