C’est avec la tête et le cœur bien remplis que j’ai achevé la lecture de ce livre ce matin. J’étais à la fois sans mots et trop pleine de mots. Pleine de toutes ces vérités qui m’ont frappées encore et encore à travers chaque page que je tournais, désireuse qu’elles atteignent toutes les femmes autour de moi. Chaque matin où je me rendais à l’université, assise dans le métro, j’espérais que la dame assise à ma droite ou encore celle se tenant debout à mes côtés lise par-dessus mon épaule, intriguée par le titre. Je voulais que ces mots fassent le plus de chemin possible, au-delà de ma voix qui tente depuis le début de ma lecture de convaincre les femmes que je côtoie de lire cet ouvrage pour qu’il change leur vie comme il a changé la mienne.
J’avais seize ans lorsque j’ai affirmé que le féminisme n’était plus utile à notre époque. Honte à moi, j’en suis bien consciente. De tels propos n’émergeaient pas d’un refus de voir la femme travailler encore plus fort pour rejoindre l’égalité et gagner sa liberté. Il s’agissait plutôt d’un manque de connaissances relatives à ce qu’évoque le féminisme en soi. Ce qu’on nous apprend sur les bancs d’école s’arrête à l’équité salariale et autres revendications relevant plus de la juridiction ou des plateformes gouvernementales. Au regard de mes vingt-trois années de vie, je constate avoir toujours été féministe sans réellement avoir saisi ce qu’il en était.
Sans en venir à dévoiler l’entièreté des concepts soutenus et adroitement détaillés par cet ouvrage, l’autrice nous amène, tout au long de notre lecture, à revoir du tout au tout les raisons pour lesquelles le féminisme ne peut être considéré comme un mouvement appartenant au passé. « Rien n’est gagné, » en vient-on à se dire, à mesure que les pages se tournent. Les arguments suggérés n’ont rien à voir avec ce que l’on a l’habitude d’entendre quand le féminisme vient à nos oreilles et c’est pourquoi ils en sont d’autant plus frappants.
À l’ère où les propos vont dans tous les sens et où les faussetés nous envahissent, il en vient difficile d’avoir espoir en le progrès. Dans cet ouvrage, Lili Boisvert a su dépeindre un réel portrait de société, si adroitement soutenu que mon cœur s’est serré par tant de vérité. Une vérité qui fait mal, qui révolte, mais qui apaise par le fait même, puisqu’on a enfin révélé ce que nous nous entêtons tous à cacher. Le cliché des arguments biologiques et réducteurs nous a toujours empêché d’avancer. Il est tellement plus simple de croire que l’odieux est régi par l’indiscutable nature. « Mais, Grand-papa, regarde autour de toi et ne viens pas me dire que nous sommes des animaux! » ai-je dit, peu de temps avant la lecture de ce livre dans le cadre d’une discussion où mon grand-père soutenait que les femmes devaient faire leur part pour éviter les agressions sexuelles. À l’image d’une conception hautement répandue, l’homme chasse et la femme est sa proie, argumentait-il avec un sourire fataliste. Je reconnais qu’à quatre-vingts ans, la mouvance des mentalités est parfois inatteignable, mais il m’a tout de même admis que notre discussion l’avait fait réfléchir. Pour ceux et celles dont je connais l’ouverture et ne serait-ce qu’une parcelle de curiosité, je leur parle du Principe du cumshot, dont j’encourage fortement la lecture, et j’ai espoir que nous arriverons un jour à redonner à la femme ce que nos rapports sociaux lui ont enlevé. Sur ce, j’espère que ce livre sera bientôt une lecture obligatoire dans le cadre des cours de sociologie au cégep et qu’on en citera le contenu dans toute matière jugée utile à la conception de la sexualité.
Merci à Lili d’avoir ouvert tant d’esprits.
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