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La pilule pour hommes serait une libération pour certaines femmes qui doivent en prendre une tous les jours, depuis des mois ou des années, et subir les effets secondaires inhérents à celle-ci.
Cependant, cette pilule n’est pas encore sur le marché.
Il y a déjà de nombreuses années que des tests sont effectués afin de trouver la bonne combinaison hormonale pour avoir un effet efficace sur la suppression de la fonction des spermatozoïdes, sans toutefois rendre les hommes infertiles. Or, les tests se sont avérés concluants dans plusieurs études à travers le monde. Les industries pharmaceutiques ne veulent pas investir dans une telle contraception, doutant de sa popularité et de sa rentabilité… Et les hommes, eux, se plaignent de devoir subir des effets secondaires semblables à ceux que les femmes subissent. Ainsi, ce projet stagne…
À ce jour, les options qui se présentent à ces messieurs en termes de contraception ne sont pas très alléchantes : d’un côté il y a le condom masculin, qui n’est pas 100% efficace et de l’autre, il y a la vasectomie qui est plutôt… radicale. Un entre-deux serait donc une option intéressante. Selon certaines études, dans le monde entier, la volonté d’utiliser la contraception hormonale masculine oscillerait entre 30% et 70% (selon les cultures et croyances) ce qui démontre une certaine ouverture à cette possibilité.
Comment ça marche?
Si du côté des femmes la pilule hormonale féminine empêche l’ovaire de relâcher l’ovule, du côté des hommes la pilule hormonale masculine empêcherait la spermatogénèse de survenir adéquatement. La spermatogénèse est le processus de production des spermatozoïdes qui se fait dans les tubes séminifères des testicules, en gros. Ainsi, les spermatozoïdes ne seraient pas viables et, donc, ne seraient pas une menace en vue d’une grossesse non désirée.
Quels sont les points positifs?
Elle serait tout d’abord très efficace, autant que la pilule féminine, ce qui limiterait les chances de grossesses non désirées. Pour les hommes ayant plusieurs partenaires ou n’ayant pas confiance en l’assiduité de celles-ci envers leur contraception, cela permettrait d’avoir un bon contrôle sur leur paternité. Certains hommes, en prenant la responsabilité de la contraception conjugale, se sentiraient comme de meilleurs partenaires et se sentiraient plus impliqués dans la planification des naissances. Elle permettrait aussi un retour à la fertilité quand l’utilisateur le désire, ce qui n’est pas le cas de la vasectomie, qui est un non-retour. Enfin, pour les couples n’utilisant pas de condom mais utilisant un contraceptif pour prévenir une éventuelle grossesse, elle permettrait plus de spontanéité et de sensations lors des rapports sexuels.
Quels sont les points négatifs?
Les études ont rapporté des effets secondaires associés à la prise de cette médication : fatigue, sueurs nocturnes, acné, prise de poids, émotions modifiées, agressivité, fluctuation de la libido, entre autres. Elle n’offre pas de protection contre les ITSS ou le VIH. Il a été observé chez les utilisateurs qu’il y avait un certain délai de retour à la fertilité suite à l’arrêt des contraceptifs, qui varie entre trois et quatre mois. Ensuite, la contraception prend un certain délai avant d’être pleinement efficace, soit entre douze à seize semaines. Une fois qu’elle l’est, il n’y a pas besoin de faire une période d’arrêt comme celle des femmes, car il n’y a pas de cycle chez l’homme ; elle peut donc être prise en continu tous les jours.
Le constat final qui ressort des études est que les hommes se contredisent entre leurs propos et leurs désirs. En bref, ils souhaitent prendre plus de responsabilités par rapport à la contraception et les pourcentages démontrent une grande ouverture, mais en réalité, ce qui est nommé semble plutôt être une peur des effets secondaires, une peur de l’oubli de la contraception quotidienne, une peur de la non-réversibilité de la contraception et une pensée biaisée par les stéréotypes sexuels véhiculés dans notre société. Étant donné que ce sont les femmes qui prennent la pilule, les hommes ne veulent pas en prendre une par crainte d’avoir l’air féminin (ce sont les études qui le disent!).
La mise en marché de la pilule hormonale masculine semble être une utopie lointaine, mais néanmoins accessible. Il s’agit en fait d’en parler et de démystifier les impacts d’une telle médication. Je crois que bien des femmes seraient heureuses de partager la responsabilité contraceptive avec leur(s) partenaires, mais la question est de savoir si les hommes sont réellement prêts et informés adéquatement à propos de ceci. Qu’en pensez-vous, chers crépus? Et vous, Crépu(e)s, seriez-vous prêtes à faire confiance à votre partenaire quant à la prise quotidienne de sa pilule?
Par Catherine Desjardins
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