Ces mots s’adressent à toi, utilisateur des applications Grindr, Hornet, Scruff et toutes les autres qui s’y apparentent. C’est à toi que je veux dire que je suis plus que ce que j’ai dans les culottes. Grosse nouvelle, je sais.
Nouvellement arrivé dans cette jungle et l’univers des rencontres de gars, j’ai le mauvais feeling d’être une marchandise. Quelque chose que tu peux consommer et jeter par la suite… sans trop te soucier de ce qui peut arriver après m’avoir envoyé à la « dompe ».
Tu me parles, tu me dis toutes les belles choses qu’un garçon voudrait entendre, pis tu y vas pas avec le dos de la cuillère; tu me trouves beau, tu as envie d’être avec moi, tu souhaites me rendre heureux, m’aimer. C’est si beau… mais c’est de la bullshit. Ton idée, elle est bien claire. Tu ne veux pas le gars que je suis, tu veux ce qui a dans mes pants. Point final. Et c’est legit de vouloir quelque chose de purement physique. On les a tous, ces passes-là où, l’instant d’un moment, on a envie de se sentir désiré, où on a envie que quelqu’un puisse nous faire sentir important, même se sentir « aimé » dans cette grosse mise en scène. Ça, je te le répète, c’est legit.
Ce qui l’est moins, c’est quand tu viens me faire croire que ce qu’on vit en ce moment, t’as envie que ça se reproduise. Que oui, t’as envie de sexe, mais pas que de ça. Et tu me le répètes. Pis esti que t’as l’air sincère. Et moi j’embarque dans ta game. On se voit plus régulièrement, je sens qu’on est bien ensemble…
Et PAF!
Plus de nouvelles, plus d’attention de ta part, plus rien. T’as eu ce que tu voulais, de la façon dont tu le souhaitais. Je deviens un parfait inconnu, tu n’es plus joignable, comme si on ne s’était jamais vus. Alors que, on va se le dire, t’as vu pas mal plus que ma face. Les belles paroles que tu me disais, ce n’était que du vent. Un gros criss de vent frette de février qui vient te geler le corps jusqu’aux os. Qui te paralyse.
Je pense que le pire, c’est pas tant le fait que tu me sacres là après qu’on ait été plus loin qu’un p’tit bec au coin d’une rue. Le pire, c’est que tu as clairement profité de la situation. Savoir ce que tu faisais, avoir choisi de m’embarquer dans ça en sachant très bien qu’il y avait des attentes. Et tu les as nourries, ces attentes-là.
Pis t’sais, alors que toi tu retournes à la conquête du prochain gars qui va tomber dans le panneau, moi je suis là à me demander ce que j’ai bien pu faire de mal, ce que je n’ai pas fait… Le hamster spin dans ma tête. Ça devient un vrai feu roulant où tous nos moments passés ensemble passent en boucle. J’essaie de comprendre. Et je suis déçu. Déçu de m’être ouvert à toi, déçu de t’avoir fait tant confiance, déçu de moi, d’y avoir cru.
Oui, je le sais, il faut s’attendre à des scénarios de la sorte sur des apps comme celles-là. Je ne me mets pas la tête dans le sable. Quand, en commençant la conversation, le gars te demande de lui donner tes mensurations, tu le sais qu’il ne t’accompagnera pas au baptême du p’tit neveu.
Mais quand tu viens me dire que t’as envie de sérieux et que tu agis comme tu le fais, on est ailleurs. La personne que tu flush après avoir eu ce que tu voulais, eh bien, elle est plus qu’une photo sur une application. Et surtout, la personne est plus que ce qu’elle a dans ses culottes. Ce serait bien de penser à l’humain derrière tout ça. Il faudrait t’en soucier avant de l’embarquer dans une histoire qui se terminera comme un coït interrompu.
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