Elle se prépare ce soir pour aller rejoindre sa date. Elle a enfilé son nouveau one-piece avant de sortir. Elle a détaché ses longs cheveux, puis a décidé de ne pas porter de soutien-gorge. Hairbra power. Son combi-short a un décolleté sur le devant, elle sait qu’on peut voir qu’elle n’en porte pas. Elle va le rejoindre chez lui, à bicyclette. Lorsqu’elle enfourche son vélo, le bas de son one-piece s’échancre et laisse percevoir un arc de chair sous la fesse. Il fait chaud. Elle se maquille les cils et se dessine une bouche en cœur. Elle sort de chez elle.
Elle emprunte une piste, croise d’autres cyclistes en sens inverse. À toutes les rencontres, elle se fait regarder le buste. Son habillement retient l’attention. Son vêtement, sa peau. Quand elle croise quelqu’un, elle prend le temps de le regarder dans les yeux pour voir si son regard s’en ira là lui aussi. Elle se dit que ça doit lui faire des belles boules son kit, pour être autant remarquée. Elle monte une pente en danseuse, fesses relevées. Le cycliste qui la suit se retourne une fois qu’il la dépasse. Elle coupe à travers le parc. Les cailloux et les racines font danser ses attraits. Elle remarque tous les regards, hommes comme femmes.
Puis elle arrive chez lui.
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La fille qui se faisait « checker » l’cul, elle peut aimer se faire regarder, elle peut aimer séduire. Elle peut aussi ne pas aimer ça. Elle peut s’habiller de même parce qu’elle est fière de son corps, mais aussi parce qu’elle a chaud. Elle peut vouloir être sexy pour celui qu’elle s’en va rejoindre et pas pour les autres. Elle peut rechercher l’approbation de tous. Elle peut vouloir choquer les frigides et les pudibondes, elle peut aimer se faire « caller ». Elle peut aussi détester ça à un tel point, qu’elle ne s’habillera plus jamais ainsi pour elle‑même, ni même pour sa date, parce qu’elle ne « tripe » pas assez sur le fait de se faire siffler par des « laites ».
Tout ça n’appartient qu’à elle.
C’est drôle, mais si y’a bien une chose que Marie-France Bazzo m’aura fait comprendre sur le féminisme, c’est que ça ne regarde personne d’autre que moi, si on voit mes bobettes quand je me balade en robe à vélo sur la piste cyclable de la rue Clark.
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