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Je parle aux morts

Savez-vous qu’il existe environ 13 personnes mortes pour chaque personne vivante sur Terre? Fini l’esprit solitaire qui vient nous hanter sporadiquement. Nous sommes submergés par les fantômes. Nous marchons sur des tas de cimetières abandonnés, de corps perdus qui ont des histoires à raconter.

Les morts sont égoïstes. Ils veulent qu’on se souvienne d’eux, qu’on parle d’eux, qu’on écrive sur eux. Comment faire autrement? Je vous le dis : les morts ont gagné sur les vivants. Et ce n’est même pas de leur faute. Nous sommes fascinés par les morts plutôt que hantés. Il n’y a pas que le petit gars psychanalysé par Bruce Willis dans Le sixième sens qui peut les voir. Tout le monde ou presque a une histoire d’esprits ou de portes qui claquent sans raison dans sa famille.

Je parle aux morts tous les jours. (C’est peut-être dans ma tête, mais ça compte pareil.) Ils sont bien là. Je les sens parfois plus vivants que moi. Il suffit de fermer les yeux et de se concentrer. Le dialogue peut s’installer. Essayez à la maison. Ils ne vous tueront pas. J’espère.

Mes mortes préférées sont des poétesses québécoises qui résonnent en moi. J’écris souvent avec Marie Uguay. Je l’imagine gênée avec ses broches, ses cheveux frisés et ses grosses lunettes carrées. Elle s’assied en diagonale de moi dans les cafés, boit seulement des lattés et essaie de finir son dernier recueil en proses. Elle m’inspire tellement. Je pourrais passer des heures à l’écouter me parler de ses triangles amoureux oppressants et des fluctuations de ses désirs. Si la littérature est un dialogue avec les morts, écrire, c’est peut-être mourir un peu. Ce sont les vivants qui hantent les morts, finalement. Ils nous attendent. Ils sont patients.

Il y a bien sûr l’héritage de nos ancêtres. Tous nos gestes au quotidien sont une continuation de ce qui a été fait avant nous, comme un long fil poétique. Nous sommes des morts-vivants. Comme dans la série The Walking Dead, j’ai parfois l’impression que la fin du monde est déjà arrivée et que nous essayons tant bien que mal de survivre dans cette jungle chaotique. C’est peut-être un symptôme de ma génération, cette impression de déjà-vu, de flotter dans l’espace en dehors de son corps, d’avoir perdu le contrôle.

Pour les besoins de l’article, j’ai ressorti ma vieille planche de Ouija. Malheureusement, ça n’a pas marché, mais il faisait frette en maudit tout d’un coup. J’ai une amie qui a été plus chanceuse que moi; son mort lui a demandé des beignes. L’histoire aurait été plus crédible s’il lui avait demandé des beignes sans gluten…

Images réalisées par l’artiste Poisson-papier

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