Mon bébé.
Mon ti-homme.
Mon grand garçon.
Bientôt, tu seras un ado. J’ai si peur de cette grande étape, peur des changements que cette période provoquera. Je ne te parle pas de voix qui mue, de poils qui apparaîtront sur ton menton ou de boutons qui feront leur niche dans tes pores de peau, ni de ma tête qui pourra bientôt se poser sur tes larges épaules sans que j’aie à m’abaisser à ta hauteur.
Ma peur est beaucoup plus profonde.
J’ai peur que tu t’éloignes de moi, que soudainement tu n’aies plus besoin envie d’écouter mes conseils, que tu cesses de me dire « je t’aime » tous les matins en partant pour l’école, que tes bisous se fassent de plus en plus discrets. Je suis terrifiée à l’idée que tu ne veuilles plus écouter un film en ma compagnie. T’sais celui qu’on écoute dans la chaleur de mon lit, nos doigts se chahutant pour attraper les derniers grains de popcorn?
Terrifiée à l’idée que tu vives des choses que tu n’auras pas envie de me confier par la suite. Je tremble à l’idée que ta première peine d’amour te fasse si mal que tu pourrais te replier sur toi‑même et vouloir cesser momentanément de respirer afin de ne plus sentir la douleur qui t’habite.
Je capote de penser que bientôt tu voudras que je te prête ma voiture afin d’afficher ton indépendance. Au moment où je te donnerai les clés, j’aurai la vision d’un chauffard qui brûle une lumière rouge parce qu’il s’est enfilé un shooter de Jack Daniel’s de trop et qu’il aura été trop con pour appeler un taxi. J’espère aussi que ce con, ce ne sera jamais toi. N’oublie jamais que j’aime mieux me faire réveiller à 4 h du matin par des paroles incohérentes avec de la musique techno en bruit de fond que par deux policiers. J’essaierai même pas de te faire honte en venant te chercher en vieux pyjama laid tellement je risque d’être soulagée que tu m’aies appelée.
J’angoisse à l’idée que tu changes de carrière 12 fois. J’espère naïvement que tu vas savoir à 16 ans ce que tu veux faire pour les 40 prochaines années de ta vie professionnelle; que tu sauras tenir un budget autant qu’une spatule à gâteau; que tu prendras soin de tes amis et de ta blonde; que tu resteras un garçon sensible, généreux et que tu seras quelqu’un de passionné et d’ouvert d’esprit.
L’adolescence a été la période la plus sombre de ma vie. Je te mentirais si je te disais que c’est facile. Et comme je n’aime pas te mentir (te dire que si tu ne manges pas tes légumes, tu cesseras de grandir ne compte pas comme un mensonge) tu dois savoir que tout ce que tu vivras au cours de ces années sera tantôt facile ou difficile et même parfois complètement débile. Tu vivras des choses qui te sembleront incompréhensibles. Tu feras face à des choix, tu devras prendre position et défendre tes opinions. Tes hormones tenteront de te transformer, même que, des fois, j’aurai l’impression que tu n’as plus rien en commun avec le ti-homme que j’ai mis au monde. Mais, il y aura aussi des moments inoubliables, des fous rires marquants, des amitiés qui résisteront aux années. Tu auras encore l’illusion que tu as la vie devant toi et que tu n’auras pas de comptes à payer ou de responsabilités parentales à endosser.
Promets-moi que tu feras attention à toi. Qu’en cas de doute, de peine ou de désespoir, tu oseras t’ouvrir à moi ou à ton père. Lui aussi est important, et je sais qu’entre gars c’est peut‑être plus facile de se dire les vraies affaires. Moi, je suis une boule d’émotions (c’est pas moi qui l’ai dit, c’est Stan dans Les Boys). Moi, je vais vouloir te serrer dans mes bras et te garder au chaud près de moi en te caressant les cheveux, en souhaitant que mes doigts arrivent à balayer d’un coup toute ta peine. Ton père, lui, va être capable de garder ses inquiétudes pour lui, d’être rationnel et cohérent dans ses conseils, même s’il se sentira croche quand tu lui auras raconté tes problèmes. C’est juste que, lui, il sera capable de faire son tough face à toi.
C’est pour ça qu’on formera une bonne team, lui et moi, quand viendra le temps de t’aider à traverser cette maudite période de marde : l’adolescence…
P.-S. Au cas où tes hormones prendraient le contrôle à tout jamais de ton cerveau, souviens-toi que je t’aime mon grand garçon!
Source photos: Pinterest, Goole.