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L’amour de soi est un sujet qui m’habite depuis quelque temps et qui se reflète beaucoup dans mes articles. Comme vous avez pu le lire récemment, il existe plusieurs moyens pour atteindre cette cohérence souhaitée avec son ressenti, que ce soit par le fait d’assumer ses choix sexuels ou en se rapprochant de son identité profonde grâce à la transexualité. Par contre, tous les gens mal dans leur peau ne sont pas transexuels, vous me direz! C’est que la question LGBTQ+ recèle encore des secrets pour nous, chers lecteurs, car il existe un large éventail de spectres d’identité de genre. Comme je l’ai déjà dit, chaque personne a son histoire! Gardez l’œil ouvert : l’amour de soi prend plusieurs formes.
Dans cet article, je vous présente une de ces histoires, celle d’un jeune Beauceron du nom d’Éric Thompson, gender-fluid, qui se confiera à nous et vous fera un portrait assez fidèle du sentiment ressenti par les gens ne s’associant pas complètement aux deux pôles sociaux : masculin et féminin.
Éric Thompson
Son enfance
Très jeune, Éric a senti qu’il était différent des autres garçons de son âge. Déjà, à 3 ans, il s’amusait parfois à porter des vêtements plus féminins sans trop voir que ce n’était pas bien vu « socialement ». Vous me direz que c’était un enfant, mais, un jour, il a mentionné à son père que s’il pouvait lui installer un panier devant son vélo, ce serait cool. À 9 ans, le jeune Éric a rapidement été confronté à la mentalité parfois très « stéréotypée » de certaines personnes sur ce qui est dit féminin ou masculin selon l’éducation populaire, car un de ses amis de l’époque lui dit que « ce genre de panier sur un vélo était pour les filles ». Éric se désintéressa alors de son panier et son père finit par l’enlever en voyant que son fils ne l’utilisait pas. Évidemment, à cet âge, il ne comprenait pas encore tous ces combats sociaux entre les préceptes amenés par la société et son sexe dit biologique. Ce genre de jugements lui laissait, chaque fois, un sentiment d’imposteur…
Je me demande bien pourquoi, si tu es né garçon, tu devrais faire telle ou telle chose ou penser différemment d’une fille? C’est une question que je me pose encore moi-même, d’où mon intérêt pour le sujet de l’identité des genres.
De sa tendre enfance jusqu’à ses 22 ans, Éric garda ses goûts changeants entre ceux dits « propres » à la femme et ceux dits « propres » à son sexe masculin, telle sa passion du hockey, par exemple. Face aux gens dans la société, il ne savait pas comment se positionner devant le malaise que sa « différence » générait chez lui et chez les autres
Recherche de soi
À l’âge de 22 ans, Éric, ayant toujours rêvé de voyager, est déménagé à Edmonton. Ce changement de lieu de résidence lui permit plus de liberté pour « expérimenter », pour essayer une nouvelle vie qui serait, en fait, une vie qui collerait plus à sa peau et l’aiderait à cheminer vers l’amour de lui-même. Événement marquant de ses 22 ans qu’il fêtait en terre albertaine, qu’il habitait depuis 6 mois déjà, il avait été mis à pied de l’emploi qu’il occupait. Seulement pour l’argent? Non, il vit rapidement, cette année-là, une opportunité d’accepter d’abord sa bissexualité, mais malheureusement, il dut se redéfinir encore car il n’avait pas pu cumuler beaucoup d’argent. Il ne regretterait jamais d’avoir osé sortir de sa zone de confort, ce qui devint rapidement une affirmation de soi. Se jeter dans le vide: le véritable confort!
Coming-out (?)
À 23 ans, il finit par le dire à sa grande-sœur et à ses parents, mais pas à tous. Il semblait redouter plus de le dire aux gens de son patelin natal, la Beauce, mais il tenait à en informer sa sœur, de qui il était très proche, puis le reste de sa famille immédiate.
Au contraire, ce n’était pas une fuite, mais des retrouvailles avec lui-même qu’il a accomplies en Alberta. Sans avoir fait ce pas, il ne pense pas qu’il aurait été capable de se lever contre les idées prédominantes de son lieu de nativité, m’avoue-t-il. D’ailleurs, certaines de ses connaissances n’accueillirent pas la nouvelle. À 28 ans, il rencontra une fille qui ne voulait pas le fréquenter à cause de ce détail. Croyant qu’elle en valait vraiment la chandelle, il décida de mettre sa bissexualité de côté et lui dit qu’il était straight en fait. Il ne s’assumait pas encore complètement. À 29 ans, ils formèrent officiellement un couple, et ce, pendant quelques semaines. Une bêtise qu’il trouve encore absurde, m’affirme-t-il. La relation se termina rapidement étant donné qu’elle n’était pas complètement authentique, mais Éric ne comprenait pas encore à l’époque qu’il ne fallait pas ainsi se renier pour quelqu’un. Que porter un masque ne faisait pas des couples forts.
C’est un besoin criant de reconnaissance qui a amené ce coming-out, car aussi loin du Québec, il aurait pu tout renier pour passer à autre chose, mais non. Sans trop se connaître encore, il s’est d’abord trouvé un emploi dans la construction, qui lui donnerait beaucoup d’argent pour ses études et sa vie dans cette ville. Mais il se rendit rapidement compte qu’il devait se redéfinir! Que l’argent n’était pas la solution à tous les maux, qu’il devait accepter QUI il était et que, sinon, il laisserait passer des opportunités : « Que je manquerais le bateau, dans un sens; que je devais me trouver un emploi en tant que MOI- MÊME à part entière », me concède-t-il.
Assumer : libérer!
C’est à 32 ans, soit 2 ans après avoir travaillé dans la construction pour « se ramasser de l’argent » afin de payer son cours de sociologie, qu’il décida ENFIN de se dévoiler à tous grâce, entre autres, à son groupe LGBTQ+ dans lequel il s’impliquait depuis son retour à l’Université MacEwan. Il y rencontra d’ailleurs quelqu’un de genre variant, une personne assez ouverte d’esprit pour qui il avait eu rapidement un faible, mais sans le lui avouer… Il ne pouvait pas faire le pas… Elle était si ouverte, et lui, il était encore si peu dévoilé.
C’est 10 ans après son coming-out sur son orientation sexuelle qu’il fit celui sur son identité de genre de gender-fluid. Une pierre, deux coups. Il se sentait maintenant libéré d’un poids énorme.
C’est en étudiant la terminologie des spectres de genre à l’université et avec son groupe LGBTQ qu’il a fini par accepter qu’il était gender-fluid et qu’il devait l’assumer pour le bien de son estime personnelle et relationnelle.
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Éric a donc perdu quelques contacts, mais dans la grande majorité, son coming-out lui a amené beaucoup plus de bien-être que de problèmes.
« Mon plus grand regret n’est pas mes coming-out, mais plutôt de m’être aussi longtemps menti à moi-même. Je me sens épanoui maintenant que je m’accepte comme je suis. », me révéle-t-il.
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