Il sommeille en chacun de nous un millier de petites graines timides enveloppées par des barrières diverses. Des petits morceaux qui rêvent d’espoir et de vie, qui attendent, patients et fragiles. Et puis il y a tout ce qui empêche l’Autre d’entrer, tout ce qui protège cet espace grouillant de vie, de vrai, d’authentique. Et malgré les barrières, malgré les appréhensions, les craintes, les masques, malgré toute la protection aux aguets face à ces possibles dangers, il arrive que certaines choses se faufilent à travers nos barrières.
Un rire qui résonne jusque dans notre être. Un regard qui nous veut du bien. Une main qui se pose sur une épaule. Le sentiment qu’une rencontre que vous venez de faire prend racine depuis plusieurs années. Quelque chose qui se passe hors du temps, hors des mots. Quelque chose qui, en un instant, fait basculer le doute, quelque chose qui perce cette coquille durement forgée. Sagesse asiatique oblige, une fois percée, l’enveloppe de verre laisse entrer la vulnérabilité et expose toute la fragilité de sa structure. Ce qui se faufile alors est à la fois ce qui peut causer le mal et ce qui peut le réparer. C’est une voie unique qui nous ouvre au monde, qui nous ramène à notre condition humaine.
Par essence, toute fracture n’est pas vaine. De ces mouvements prompts et parfois brusques naît un univers de possibilités. Une petite faille de rien du tout qui permet au vent de vaciller, à la lumière de valser, à la pluie de tourbillonner et à l’amour de nous envelopper.
C’est dans cet univers de mouvements que l’on arrive à y voir plus clair, chaque parcelle nous rapprochant toujours un peu plus de ce qui ne s’achète pas.
Ce qui se faufile à travers nos barrières est de l’ordre de ce qui ne se touche pas. Et faute de ne jamais pouvoir le saisir tout entier, le véritable plaisir serait peut-être justement de le laisser se faufiler, doucement.
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