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sylvia plath

C’est un peu comme si son nom était resté en suspens dans l’air. Une référence floue que l’on connaît sans la connaître. Une de ces artistes à l’existence tourmentée à la Virginia Woolf ou Frida Kahlo. Mais le cas de Sylvia Plath est plus qu’une histoire triste, c’est une écrivaine de talent qui a su briller dans la noirceur et laisser derrière elle une œuvre considérable.

Sylvia Plath est une poète américaine née à Boston en 1932. C’est une jeune femme douée et brillante qui se passionne pour l’écriture dès l’enfance. À huit ans seulement, elle publie son premier poème. Lorsqu’elle entre au Smith College à dix-huit, elle a publié déjà plusieurs nouvelles et remporté de nombreux prix. La vie lui sourit, et pourtant…

Pourtant, une fissure se crée à la base de son être. Une craque toute mince qui débute sous la plante de son pied pour remonter jusqu’à l’arrière de son oreille gauche, lentement, sans que personne s’en rende compte, jusqu’à ce que tout éclate. À la lecture de son roman The Bell Jar, quiconque ayant vécu un épisode dépressif se reconnaîtra dans ses mots. Elle y décrit la dépression comme une cloche de verre, un dôme invisible pour les autres, mais qui l’emprisonne et déforme sa réalité. Elle livre son récit avec force et vulnérabilité, à la façon de quelqu’un qui porte la vie à fleur de peau.

Et c’est de cette façon qu’elle écrira toute sa vie jusqu’à son suicide en 1963. Parce oui, Sylvia Plath figure dans la longue liste de personnalités à s’être enlevé la vie. Après des années à s’être battue contre sa propre noirceur, elle a décidé un jour de déposer sa tête sur le plancher, après avoir préparé des biscuits pour les enfants, calfeutré leur porte et ouvert leur fenêtre, de poser sa tête donc sur le sol devant la cuisinière au gaz. Elle s’est endormie ainsi pour échapper à jamais à la cloche de verre, qui l’avait faite prisonnière une fois de plus.

Photo : Fauve Jutras

Il y a quelque chose dans ses mots et dans son histoire qui me fascine. Sa vérité, son authenticité font résonner sa voix dans mes oreilles, laissent de traces sur ma peau. Je lui dois un de mes poèmes préférés dont les vers flottent dans ma tête depuis ma première lecture.

Mad girl’s love song

I shut my eyes and all the world drops dead;
I lift my lids and all is born again.
(I think I made you up inside my head.)

The stars go waltzing out in blue and red,
And arbitrary blackness gallops in:
I shut my eyes and all the world drops dead.

I dreamed that you bewitched me into bed
And sung me moon-struck, kissed me quite insane.
(I think I made you up inside my head.)

God topples from the sky, hell’s fires fade:
Exit seraphim and Satan’s men:
I shut my eyes and all the world drops dead.

I fancied you’d return the way you said,
But I grow old and I forget your name.
(I think I made you up inside my head.)

I should have loved a thunderbird instead;
At least when spring comes they roar back again.
I shut my eyes and all the world drops dead.
(I think I made you up inside my head.)[1]

On y retrouve un peu de tout ce qui caractérise la poésie de Sylvia Plath : l’amour, la folie, la force, la nostalgie, la distance. Elle reprend une forme classique de la poésie, la villanelle, et y ajoute une touche moderne par son thème et l’utilisation des parenthèses. Et cette ligne qui revient sans cesse, comme un refrain (I think I made you up inside my head), dans l’esprit cabossé d’une jeune femme cherchant à s’accrocher au réel. Pour moi, tous ces éléments rassemblés, toutes ces cicatrices qu’elle arbore sans détourner le regard, font de Sylvia Plath une grande poète à découvrir.

[1] Plath, Sylvia. « Mad girl’s love song », 1951, https://allpoetry.com/Mad-Girl’s-Love-Song.

Photo : Julienne Erika Alviar
Source : Unsplash

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