Source: Éliane Fortier
D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours été une personne qui se comparait beaucoup et qui essayait de rationaliser le succès des autres. Je me disais, par exemple : « c’est une plus belle fille que moi, elle est avantagée », « il est full populaire », « ses parents ont plein de cash ». Toutes des pensées qui me portaient à croire qu’il me manquait des cordes à mon arc pour réussir aussi bien que certains. Pourtant, cela ne m’a pas freiné et j’ai toujours voulu en faire plus sans nécessairement me questionner sur la raison qui se cachait derrière cette envie. Après tout, ce n’est pas le fait de booster ton CV à coup de bénévolats, de comités étudiants ou de formations en ligne qui feront de toi un humain de plus grande qualité, plus convoitable par la société.
Malgré le fait que j’étais consciente de cette relation malsaine que j’avais avec le concept de la réussite, il y avait tout de même en moi cette petite voix qui me rappelait que je n’en faisais pas assez. Et je n’étais pas la seule quand je repense à certaines de mes amies qui étaient déçues de n’avoir eu que 91% à leur examen ou à tous ceux qui désiraient à tout prix être productifs, être utiles pendant le confinement. Il ne fallait surtout pas « perdre son temps ». Cette pression de performance m’a amenée à vouloir m’accomplir dans toutes les sphères de ma vie : avoir une maîtrise à tout prix, voyager à l’autre bout du globe en backpack à la fin de mes études et être dans une relation amoureuse. Je croyais qu’après tout cela, il n’y aurait plus d’obstacles au bonheur pour moi.
Je réalise qu’on ne doit pas se souhaiter le succès à tout prix, surtout s’il est vide de sens. On doit plutôt viser l’accomplissement personnel (coucou Maslow). On dit souvent que lorsque l’on doit « forcer » les choses, c’est qu’elles n’étaient pas dues pour arriver, et c’est vrai. Alors, si ta passion, ton travail acharné et ton ambition t’amènent à avoir du succès, c’est super, mais il ne faut pas chercher cette conclusion à tout prix, car nous serons continuellement insatisfaits. On a peur de l’échec, peur de l’inconnu, peur de la critique, peur de l’effort, peur de ne pas savoir par où commencer, et c’est à ce moment qu’on paralyse. Si je n’y crois pas, bien sûr que ça ne fonctionnera pas parce que je n’essayerai même pas !
Aujourd’hui, je vous raconte tout cela en parlant au passé, mais c’est un travail à faire sur soi quotidiennement. Un cheminement d’autant plus ardu lorsque nous sommes constamment confrontés aux exploits d’autrui partout sur les réseaux sociaux, comme ceux de notre cher Laurent Duvernay-Tardif. Qui de mieux pour représenter le symbole même de « l’overachievement » des temps modernes? Bref, je ne suis pas ici pour faire le procès de ce demi-dieu, mais pour nous rappeler d’être indulgents envers nous-mêmes et de pardonner nos échecs, car ils font partie du succès.
Et pour tous ceux qui ont besoin d’entendre cela aujourd’hui, je me permets de citer les mots de l’artiste québécoise Pony qui, je l’espère, trouveront écho chez certains d’entre vous : « T’es fucking parfait comme tu es maintenant. Le pire c’est que ce n’est pas du feel good bullshit, c’est actually vrai. Les gens qui te voient vraiment pour qui tu es t’aiment comme tu es live. Ils n’attendent pas que tu écrives une autre toune ou que tu fasses un nouveau meilleur dessin pour t’aimer plus. Ils t’aiment déjà. L’amour ne devrait pas être conditionnel à tes accomplissements professionnels. »
Réviseure Amélie Carrier