Mes parents divorcent.
« Ça ne fonctionne plus. Depuis longtemps. Je vais garder la maison et… »
Je n’entends plus rien.
Je m’écroule.
Mes 23 ans se dissipent et je retrouve ma fragilité d’enfant. La vulnérabilité d’une fillette de sept ans qui n’a que très peu de repères, qui a besoin de ses parents.
Puis, c’est mon rôle de grande sœur qui me frappe. Celle qui devrait protéger son petit frère et sa petite sœur qui habitent toujours la maison familiale. Coupable. Je me sens tellement mal de ne pas être plus présente pour eux, parce que j’ai construit ma vie en ville. Mais en même temps tellement soulagée d’être loin de la tempête.
Je n’arrive pas à en parler, je ne peux même pas y penser sans m’effondrer. J’ignore quoi dire, quoi faire, comment le vivre. Alors j’écris.
Je n’ai plus de famille. Vous me direz que j’exagère, pourtant non. J’ai maintenant un père, une mère, une sœur et un frère, mais une famille? Non. Le tout est plus que la somme de ses parties. Vous connaissez cette expression? Maintenant je la comprends. Notre tout s’est divisé, toutes les parties sont brisées, craintives, vulnérables.
Je ne sais pas si je pourrai avoir mes deux parents à la table d’honneur de mon mariage. Je ne pourrai pas amener mes enfants chez grand-papa et grand-maman et leur montrer laquelle des pièces était ma chambre. Je devrai gérer les tensions, les querelles, la rancune. Tenter de ne prendre aucun parti. Noël se transformera en une gymnastique d’horaire irritante et perdra son sens de partage.
Plus de camping, plus de brunch, plus d’inside familial.
Mes souvenirs les plus précieux s’entasseront dans une boîte qui accumulera la poussière. L’évoquer deviendra douloureux. Les ressasser me rendra amer.
Dans cette époque où l’amour est qualifié d’éphémère, d’impossible, j’avais toujours pris sa défense. J’avais toujours prôné la beauté, la magie, les sacrifices. J’y croyais, tout le monde le savait. Et voilà que je change de camp, mon cœur se ferme, le divorce l’a déchiré. Rien ne dure pour toujours.