Vous savez ces trophées, ces petites victoires, qui nous rendent bien toute la gloire que nous méritons, lorsque nous atteignons enfin notre objectif, le but que nous nous étions fixé. Mais qu’advient-il du défi, une fois celui-ci accompli?
Une fois le défi relevé et les honneurs reçus, nous délaissons ces médailles, nous les rangeons dans des cartons. Une fois bien contemplées, nous ne les admirons plus. Nous ne les remarquons même plus sur nos tablettes. Elles ne comptent plus. Elles redeviennent ce qu’elles étaient à leur état initial, soit de vulgaires bouts de métal. Ainsi, sans le prestige que nous leur accordons, leur valeur s’éclipse aussitôt.
À nous entendre parler, j’ai parfois l’impression que nous idéalisons certains hommes, tout comme nous poursuivons certains buts. Nous voulons nous pavaner avec le charmant barbu hipster juste pour faire beau, juste pour être enviées. Tout comme nous participons à certaines compétitions. Nous nous fixons des objectifs du genre : repartir avec le barman, le chanteur ou celui qui fait le plus d’attitude. Mais une fois le lendemain arrivé, ils ne valent plus rien, ils ne sont plus autant séduisants. Il n’y a plus personne pour admirer notre conquête, plus de spectateurs pour nous admirer, plus de défi à relever.
Ne nous étions-nous pas imaginé davantage que cette simple étreinte? Ne voulions-nous pas davantage de ce trophée? Ne nous intéressait-il pas? Avions-nous des points communs? S’agissait-il d’un coup de foudre? D’un réel et éventuel partenaire?
La plupart du temps, nous ne sommes même pas en mesure de répondre à toutes ces questions, car nous n’avions même pas réfléchi au-delà du « c’est celui-là que je veux attirer, que je veux réussir à séduire ». Sans mentir, nous avions besoin de l’ajouter à notre liste, qu’il fasse partie de notre tableau de chasse, car il était si joli à regarder.
Mais avons-nous pris le temps d’évaluer les dommages de cette chasse abusive aux belles choses qui fittent bien dans le décor parfait que nous avons mis plusieurs années à construire? Ces hommes, comment se sentent-ils, de ne jamais être aimés pour qui ils sont, de pouvoir ramener n’importe laquelle de ces filles, mais sans jamais se faire rappeler. Nous ne les abîmons pas, d’une certaine manière? Comment pourront-ils croire qu’ils valent plus que leurs beaux yeux si aucune d’entre nous ne les valorise pour leurs jeux de mots ou encore pour leur choix déco?
Serions-nous rendues à ce point superficielles? Nos échanges seraient-ils à ce point futiles? Avec des applications comme Tinder, j’en suis forcée à le croire. Les armes que sont l’accessibilité des médias sociaux et l’absence de réserve dont nous faisons preuve dans les bars après une goutte d’alcool nous rendent toutes un peu criminelles. Eh oui, nous faisons maintenant des « victimes au lit », un comportement que nous reprochions aux beaux Ginos/machos il n’y a pas si longtemps.
Et maintenant, je me demande à quand le drapeau blanc? À quand je te ramène non seulement pour ton contenant, mais également pour ton contenu qui m’a, ma foi, complètement conquise?