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Syndrome post-débarque amoureuse

On va se l’avouer : l’amour, ça nous magane.

Là, j’ai l’air de dire une évidence. C’est vrai, c’est comme dire qu’il faut regarder des deux côtés de la rue avant de traverser ou que le soleil est une place chaude. Duh, comme ils disent en Anglais.

J’en suis toutefois venue à rejeter ce « duh », parce qu’on le sait que l’amour ça nous magane, mais on choisit souvent quand même de l’ignorer… ou peut-être qu’on ne l’ignore pas, mais on le voit un peu comme on voit un accident de voiture : on pense toujours que ça n’arrive qu’aux autres. Jusqu’au jour où on se fait ramasser par un 4X4.

C’est souvent brutal, une roue drette dans les genoux, un pare-brise contre notre crâne. Ça peut être plus subtil aussi : une côte fêlée ou un airbag sur le visage. Parfois, on se fait rentrer dedans sans le voir venir ; parfois, c’est nous qui causons le choc. On fait souvent l’erreur de penser que quand c’est nous qui sommes en contrôle de la dérape, ça va faire moins mal. T’sais, quand on y pense, c’est sûr que de se faire rentrer dedans quand on traverse la rue, ça ne fait pas de bien, mais, un airbag au visage, ce n’est pas agréable non plus. Enfin, toutes ces analogies de collision sont là pour dire que, l’amour, c’est beau, mais c’est aussi quelque chose de violent et on en ressort rarement indemne.

Pis, des fois, ça prend longtemps à s’en rendre compte. Pourtant, les séquelles sont là : l’incapacité à s’imaginer être confortable en couple à nouveau, la confiance sur le respirateur artificiel… tu vois le genre? Il faut faire nos deuils : celui de la relation, mais, souvent – surtout, il faut faire le deuil de la personne qu’on était pour accepter la nouvelle personne qu’on a à offrir. On n’est pas moins désirable, mais on est différent. On a peur… et, parfois, c’est très long avant d’admettre à quel point on a peur.

Qu’est-ce qu’on fait dans ce temps-là? Généralement, on enfile les histoires sans queue ni tête ; les gars avec qui ça a zéro chance de marcher pour des raisons X, Y, Z. On ne manque jamais de gars avec qui ça ne marchera pas.

Puis, après la boucane et les fausses espérances, on scande que l’amour c’est « donc ben de la marde, » on abandonne et on s’établit une belle petite place dans le déni. On y croit! On pense que c’est une maudite belle place, le déni. On s’y pense protégée, mais la vérité est que le déni est un mirage pis ça ne nous tient pas chaud l’hiver.

Le truc, c’est que c’est facile de passer par dessus ces gars-là ; les unavailables de ce monde, ceux qu’on choisit par exprès, sans s’en rendre compte, justement parce qu’ils ne sont pas pour nous. C’est quand on sort de notre déni – ou quand quelqu’un nous en sort tranquillement pas vite – qu’on réalise qu’on faisait tout ça parce qu’on avait peur du vrai. C’est facile de passer par dessus des gars qui n’ont jamais voulu de nous, parce que, souvent, dans le fond, on ne voulait pas plus d’eux non plus. C’est quand en vient un qui fait les bonnes choses qu’on réalise à quel point on a peur. Je ne parle pas ici d’avoir peur de s’engager ; vous connaissez peut-être déjà mon opinion sur le sujet (ce n’est pas beau, mettons ça comme ça).

Non, on n’a pas peur de s’engager, mais on a peur d’avoir mal. On a peur de donner des bouts de soi alors qu’on a passé si longtemps à les rassembler. Chaque petit bout est important quand on en a perdu tant en chemin. On a peur aussi que la personne qu’on est devenue au fil des bleus et des éraflures de l’amour ne soit pas aussi belle que celle qu’on était avant, peur que cette nouvelle flamme, celle qui fait si bien les choses, ne comprenne pas nos failles, ne comprenne pas que nos fissures laissent entrer le soleil. On a peur qu’elle n’ait pas la patience d’attendre le lever du jour.

Voilà, c’est dit : on a la chienne. C’est déjà bien de se l’avouer, non?

Après ça, je n’ai pas de solution. Ce n’est pas ce genre de texte-là. C’est plus là pour qu’on accepte de s’avouer que c’est correct d’être terrifié, incertain et hésitant à faire un pas vers l’avant. Ce n’est pas un texte à solution, mais peut-être que de s’avouer tout ça, c’est déjà un bon début. C’est déjà une victoire de prendre la main de quelqu’un de bien, de quitter le déni, de laisser le mirage derrière et d’aller se chercher de la vraie chaleur pour contrer la fin de l’hiver.

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