Quand je regarde nos vies, je me demande comment on est devenu des étrangers.
Je t’aimais déjà quand on s’est parlé pour la première fois il y a quelques années. Je ne parle pas d’amour, je parle d’amitié. L’alcool était au rendez-vous, mais je savais déjà qu’on ferait un bout de chemin ensemble, même juste en étant amis. Je ne pourrais pas te décrire le feeling que j’avais, mais tu l’avais aussi. On ne se voyait pas si souvent, mais on s’entendait tellement bien, comme si on s’était toujours connu, comme si on se comprenait mieux que personne.
Et ça nous appartenait juste à nous parce que pas grand monde savait qu’on était proche dans nos cercles d’amis. Un genre de secret sans qu’on ait fait exprès. J’aimais ça comme ça.
On allait bien pendant un bout, mais un jour ça a dérapé. On a confondu notre amitié avec de l’amour et c’est devenu tendu entre nous. On s’est voulu, plus qu’on n’a jamais rien voulu d’autre avant, mais on n’a pas franchi la ligne parce que ça nous aurait brisé. Ç’a été un été des plus intenses à résister à nous parce que notre amitié comptait trop pour moi. Mais surtout, je partais loin pour un an. Même si on a gardé contact pendant mon voyage et après mon retour, on s’est perdu.
On est devenu des étrangers. Comme si notre histoire n’avait été que poussière. Comme si ça n’avait jamais compté. C’est devenu froid, voire glacial. Jusqu’à ce que ce ne soit plus rien du tout. Et ça m’a fait mal.
Quand je regarde nos vies aujourd’hui, je me demande comment on en est arrivé là. Toi, dans ton coin de pays, moi, dans le mien.
Je ne suis même plus sûre de savoir où tu en es, avec les amours, le travail, la vie. Je ne sais même plus ce que sont tes hauts et tes bas, tes envies, tes ambitions. Je ne sais plus qui tu es.
Quand je regarde nos vies si lointaines l’une de l’autre, je me demande comment on s’est retrouvé là quand on a été si proche. Pourquoi on s’est égaré.
Quand je regarde nos vies, je me dis que peut-être qu’un jour on va se retrouver et redevenir amis. Ou peut-être pas. Faire un autre bout de chemin ensemble. Ou peut-être pas. Ça ne me dérange plus.
Mais surtout, quand je regarde nos vies, j’ai envie de lever un verre à cette amitié, qui malgré son expiration, en a franchement valu la peine.